Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (1/2014). Michel Drain propose une analyse de l’ouvrage de Herfried Münkler, Der Grosse Krieg. Die Welt 1914-1918 (Berlin, Rowohlt, 2013, 4e édition, 928 pages).
Herfried Münkler présente avec Der Große Krieg (la Grande Guerre) une synthèse très claire sur la Première Guerre mondiale. Bien qu’il n’exploite pas de sources inédites, cet ouvrage donne un éclairage intéressant sur le conflit, vu principalement du côté allemand.
En 1914, trois centres de pouvoir se concurrencent : Guillaume II, le Grand État-Major et le chancelier Bethmann-Hollweg. L’empereur se condamne vite lui-même à l’insignifiance. Après la chute de Bethmann-Hollweg en juillet 1917, le général Ludendorff dispose dans les faits de la totalité du pouvoir jusqu’à la défaite. Le Reichstag, qui débat pendant toute la guerre et qui vote une résolution de paix en juillet 1917, ne joue qu’un rôle d’observateur. L’opinion publique compte, en revanche : on craint de lui avouer que les immenses sacrifices demandés n’ont servi à rien, d’où une constante fuite en avant, qu’illustre la guerre sous-marine à outrance déclenchée début 1917 malgré la perspective de l’intervention américaine. En 1914, l’Allemagne n’est pas sous l’influence d’un militarisme fauteur de guerre, mais le pouvoir politique ne contrôle pas l’État-Major qui peut lui imposer la seule solution militaire efficace à ses yeux : le passage des forces allemandes par la Belgique, alors qu’il déclenche l’entrée en guerre du Royaume-Uni.
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