La Croix (édition du 07/09/12 à lire ici) : Jean-Christophe Ploquin y consacre une colonne au dernier numéro de Politique étrangère (2/2012) et à son dossier « Internet, outil de puissance ». À lire également ci-dessous.

REVUE — États contre internautes sur le Web
La gouvernance d’Internet

Internet s’apparente-t-il à un Far West ou à la terre promise ? Sur les terres à peine défrichées qu’arpentent chaque jour davantage d’internautes, chacun cultive tranquillement son lopin de relations personnelles, sème et récolte les informations. On se retrouve dans sa communauté. De gros investisseurs tirent des lignes de communication et développent le commerce. La prime est à l’audace, voire au bluff. Les fortunes se font et se défont très rapidement. La vie sur le réseau est plutôt tranquille, même si des malfaiteurs guettent toujours. La régulation se déroule entre gentlemen, qui se retrouvent dans des forums. Il n’y a pas de chef mais des experts, des sociétés privés, des représentants de la société civile, et parfois le shérif – les gouvernements.
Ce monde toucherait-il à sa fin ? Internet est une réussite phénoménale puisque aujourd’hui 2 milliards d’humains sont connectés et que les entreprises y réalisent des chiffres d’affaires en milliards de dollars. Mais en changeant de dimension, il concerne de plus en plus les États, qui constatent qu’ils n’ont pas leur mot à dire. Il n’existe pas, à ce jour, un seul traité ou convention internationale relative à Internet. C’est cet instant crucial que signale la revue Politique étrangère. Car des joutes se préparent. Les acteurs historiques de l’Internet, qui en ont assuré le développement grâce à des systèmes d’interaction souples entre des organismes s’intéressant à la technique, pas aux contenus, défendent une forme de gouvernance qui a privilégié trois acquis : la généralisation de l’accès, l’interopérabilité globale et un équilibre entre la facilité d’utilisation et les exigences de sécurité. Mais Internet a pris une telle place qu’il touche désormais à de nombreux domaines : droits de l’homme, liberté d’expression, respect de la vie privée, protection de la propriété intellectuelle, droit de la concurrence, sécurité nationale…
Cela conduit les États à vouloir légiférer. Le débat est tendu par ceux des pays qui entendent exercer une censure sur leurs citoyens, au premier rang desquels la Chine et ses 500 millions d’internautes. Sociétés civiles contre États : c’est l’affrontement auquel les auteurs du dossier de Politique étrangère ne voudraient pas assister. Ce qui nécessitera, selon eux, de créer une troisième voie en matière de gouvernance.

JEAN-CHRISTOPHE PLOQUIN

Politique étrangère, été 2012, 20 €.
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