Cette recension est issue de Politique étrangère 1/2013. Vivien Pertusot propose une analyse de l’ouvrage de Maxime Lefebvre, L’Union européenne peut-elle devenir une grande puissance ? (Paris, La Documentation française, 2012, 180 pages).

couv-LefebvreLa question d’une éventuelle puissance européenne est un sujet aussi usé qu’inépuisable. Michael Cooper, diplomate chevronné de l’Union européenne (UE), écrivait récemment que la politique étrangère européenne a probablement suscité plus de réflexions qu’elle n’a connu d’avancées ces dix dernières années. C’est donc sur ce terrain miné que s’aventure Maxime Lefebvre, lui-même diplomate et professeur à Sciences Po et à l’École nationale d’administration (ENA).
Ce livre n’est pas un ouvrage académique et n’entend pas apporter d’éclairage nouveau sur la politique extérieure de l’Union à un observateur informé. L’objectif est ici de faire un état des lieux et de dresser un bilan en adoptant une approche analytique.
Maxime Lefebvre aurait pu privilégier une réflexion à tiroirs, ce qui est souvent le cas dans ce type de livres courts. Il a préféré prendre de la hauteur, notamment avec un détour historique bienvenu et suffisamment rare pour être apprécié. L’auteur cherche les fondements de la puissance européenne dans l’Histoire, tout autant pour expliquer son éternelle quête que pour expliquer la difficulté de s’accorder aujourd’hui entre des États membres qui, pour certains, ont été de grandes puissances par le passé. Il analyse ensuite les atouts dont dispose l’Union européenne, en termes économiques, militaires et diplomatiques. Enfin, il tente de placer l’UE sur l’échiquier international en relation avec son voisinage, mais également les grandes puissances d’aujourd’hui.
L’auteur nous livre une analyse réaliste, bien qu’optimiste, de la situation ; l’inverse eût été peut-être tout aussi réaliste… Fidèle à une approche française, M. Lefebvre reste convaincu de la portée d’une Union européenne forte – ce que la France continue d’appeler l’« Europe puissance », bien que le terme soit un peu démodé.
Toutefois, l’ouvrage laisse un peu sur sa faim. À vouloir couvrir un spectre de dossiers aussi large, la substance pâtit – c’est le revers du format court.
L’usage des sources par exemple illustre cette lacune : pas de bibliographie ni de notes de bas de page. En outre, on peut questionner – sans être trop surpris – l’intérêt d’avoir adopté une position aussi française sur la politique extérieure européenne. Il aurait été intéressant de la mettre en porte à faux. Si la politique extérieure européenne avance à petits pas, c’est en partie grâce à la France – notamment sur les domaines traditionnels de la politique étrangère et de la défense ; mais on peut aussi arguer que c’est en partie à cause d’une vision française peu compréhensible, parfois perçue comme trop ambitieuse par les autres États membres, qu’elle piétine. En français, rares sont les auteurs qui s’attellent à remettre en question la posture traditionnelle française à ce sujet.
Cette réserve faite, ce livre constitue une excellente introduction pour tout lecteur curieux de découvrir les tenants et les aboutissants de la politique extérieure européenne.

Vivien Pertusot

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