Cette recension a été publiée dans le numéro de printemps de Politique étrangère (n°1/2017). Hans Stark, secrétaire général du Comité d’études des relations franco-allemandes à l’Ifri, propose une analyse de l’ouvrage dirigé par Alexander Häusler, Die Alternative für Deutschland. Programmatik, Entwicklung und politische Verortung (Springer Verlag, 2016, 256 pages).

Die Alternative fur Deutschland

La naissance, en 2013, du parti Alternative für Deutschland (AfD, Alternative pour l’Allemagne), sa montée en puissance dans les sondages et son entrée aux parlements de 10 des 16 Länder allemands (au 1er février 2017) ont provoqué un intérêt très vif pour cette formation, d’autant que sa progression s’inscrivait évidemment dans le contexte des succès électoraux de partis dits « populistes de droite » en Europe, le Brexit et la victoire de Trump. Sans parler de l’ombre omniprésente du IIIe Reich. C’est donc à point nommé qu’un collectif de chercheurs allemands, spécialistes de l’extrême droite d’outre-Rhin, a réalisé une première étude d’ensemble, sous le titre : L’Alternative pour l’Allemagne. Programme, évolution et positionnement politique.

L’ouvrage retrace les origines de ce parti de 2013 jusqu’à l’éviction de son président-fondateur Bernd Lucke, en juillet 2015. Il ne prend donc pas en compte l’évolution des 18 derniers mois qui ont vu une poussée incontestable vers l’extrême droite de l’AfD ; mais les auteurs l’avaient prédite, comme en témoigne la conclusion du directeur de l’ouvrage Alexander Häusler.

Sa première partie est consacrée à la place de l’AfD dans le paysage politique allemand, et aux contradictions internes d’un parti qui prône à la fois un néolibéralisme souverainiste eurosceptique et un « populisme de droite » qui se dit « proche du peuple », et donc aussi de gauche… La deuxième partie propose une comparaison entre l’idéologie de l’AfD et celle des autres partis dits populistes en Europe, puis analyse les liens entre l’AfD et les partis d’extrême droite issus des pays membres de l’UE. La troisième partie de l’ouvrage analyse les idéaux fondamentaux de l’AfD au plan sociétal, tant en ce qui concerne le rôle de la femme dans la société allemande, que la position adoptée face aux minorités sexuelles, ou quant à certaines valeurs traditionnelles (famille, IVG). Dans une quatrième partie, les auteurs s’intéressent au phénomène PEGIDA (Patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident), et aux liens multiples entre ce mouvement et l’AfD, avant d’aborder les questions, devenues centrales depuis 2015, de l’islam, de l’immigration et des réfugiés. La cinquième partie s’ouvre au champ plus vaste de la nébuleuse d’extrême droite en Allemagne, et étudie les rapports entre l’AfD et la « Nouvelle Droite », avant d’analyser l’évolution interne du mouvement de jeunesse de l’AfD, la Junge Alternative, dont les acteurs, qui prendront des responsabilités au sein de l’AfD dans les années à venir, se positionnent d’ores et déjà à l’extrême droite du paysage politique allemand. Enfin, l’ouvrage accorde aussi une importance particulière à la place que l’AfD a à l’est de l’Allemagne, avec un chapitre consacré à l’AfD du Land de Brandebourg.

Voici donc un ouvrage, informatif et analytique, qui nous en apprend beaucoup sur ce nouveau parti. Et ce que l’on apprend n’est pas très rassurant.

Hans Stark

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