Le blog Reflets du Temps, qui consacre une large place aux questions internationales, a publié le 28 avril dernier un article mettant à l’honneur le numéro de printemps (n°1/2018) de Politique étrangère : « États : quel nouveau souffle ? ».

Où en sommes-nous, où en sont les débats sur la question : les États sont-ils en perte de vitesse (thèse décliniste) ou redressent-ils la tête (thèse de la résistance) ?

« Danser avec les États »(Serge Sur) dresse depuis les années 90 le tableau de la fragmentation des États, en Europe notamment, happés parfois par des empires « mal disparus ou renaissants », alors que de nombreuses tentations de sécessions secouent d’autres États européens. Tableau étendu à l’évolution de la notion d’État en Asie, Afrique.

Mais qu’est-ce qu’un État ? « Remplir pour sa population des missions telles qu’éduquer, protéger, favoriser son emploi, garantir la santé publique, reconnaître ses droits, assurer sa vie paisible, et l’épanouissement individuel de ses membres, dans un cadre juridique et politique, accepté sans discriminations par tous ».

Ensemble fragile – Serge Sur parle de l’État Titanic – multipliant les défaillances, précipitant moins les sécessions par attaques extérieures que par faiblesses intérieures. Riche article faisant un point très précis et clair sur l’historique, fourmillant de notions définies ; ainsi du rappel de l’État nation dont le creuset intègre, et dont l’appartenance est de l’ordre d’une solidarité subjective, librement consentie (conception française ou américaine). Modèle qui cède souvent à présent le pas à une conception d’origine germanique, reposant sur une communauté ethnique.

« Les débats contemporains sur la fin des États »(Frédéric Ramel) : remarquable éclairage sur la somme des débats d’experts sur la thématique de « la fin des États » depuis la fin des années 70, alimentés par la fin de la guerre froide, relancés par le 11 Septembre, la crise économique et financière de 2008, le Brexit, bien sûr, et la victoire de D. Trump en 2016. Traversés par la crise des migrants dès 2015 en Europe, la montée des populismes. Où en sont les États dans ces difficultés et profondes modifications ? L’auteur examine ces débats à travers trois prismes : stratégique – désétatisation du fait guerrier, mais aussi retour des guerres entre États – économique – du G20, et de son utilisation – et morphologique – entendons, où en est le désir d’État aujourd’hui, et les représentations qui l’accompagnent ? De très utiles repères notionnels nourrissent l’article ; ainsi de l’évolution de l’État gendarme, de l’État providence, mais aussi de l’État virtuel, ou de l’État région. La mondialisation – élément fondamental dans le jeu étatique, oblige de fait à des adaptations incessantes (l’exemple éclairant est pris du Brexit dans ses origines, mécanismes, conséquences). Les États n’ont donc pas disparu, mais leur tectonique agitée, leur façon de se mouvoir dans le système international fait l’objet de constants changements.

Ce sont aux empires (l’ensemble varié avec centre, sous la direction d’une ethnie ou d’un groupe national dominant) que s’intéresse Georges-Henri Soutou (Des empires dans tous leurs États). Large rappel historique des empires européens du passé, leur facteur paix en internalisant les conflits, ou guerre, comme au siècle dernier. Leur dissolution (fin de l’URSS) et l’instabilité qui en découla(e) souvent. La problématique développée par l’auteur : « Leur mode de fonctionnement pré-national pourrait aider à penser le post-national » est fort intéressante.

Le dernier article du thème principal de la revue PE de printemps, signé de la spécialiste du Moyen–Orient de l’IFRI, Dorothée Schmid, est consacré aux « États du Moyen-Orient, crise et retour ». Article brillant qui traite du concept d’État sur ces territoires, si mouvants et instables à nos yeux. « Revitalisation d’une demande d’État » dans cette partie du monde ébranlée par les révolutions arabes de 2011, qui a, depuis, travaillé à de multiples réformes. Comme une vaste conclusion au thème, un chantier – crises multiples, menaces d’éclatements, violences, puis chemins de retour : « L’État connaît dans la région une vie nouvelle même si elle est mouvementée », appliqué à des territoires, leur histoire, leurs minorités.

Signalons que d’autres sujets et articles de ce numéro de la revue ont en fil rouge le concept d’État ; ainsi : « L’Écosse, nationalisme, immigration, retour des frontières ».« La crise en Catalogne, une fracture décisive ». Ou « Liban, entre clientélisme régional et carcan national ».

Car un concept comme celui des États n’a pas fini d’animer le regard, et la réflexion des géopoliticiens…

Retrouvez cet article sur www.refletsdutemps.fr.

S’abonner à Politique étrangère.