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Géopolitique de la cyber-conflictualité

La rédaction a le plaisir de vous offrir à lire ce second article, « Géopolitique de la cyber-conflictualité », écrit par Julien Nocetti, chercheur au Centre Russie/NEI de l’Ifri et spécialiste des questions liées au numérique et à la cybersécurité, et paru dans notre nouveau numéro de Politique étrangère (n° 2/2018), « Cybersécurité : extension du domaine de la lutte ».

Les événements internationaux des deux dernières années ont placé les problématiques de cybersécurité au cœur des agendas diplomatiques et stratégiques. Les piratages successifs de grands acteurs de la tech, comme Yahoo !, l’apparition de nouvelles menaces à grande échelle comme les « rançongiciels » WannaCry et NotPetya, ainsi que la confirmation d’une course aux cyber-armements, traduisent la volatilité d’une politique internationale bouleversée par la dissémination des moyens numériques. Les soupçons d’ingérence russe dans l’élection présidentielle américaine en 2016, via une campagne d’influence sur internet, ajoutent à ces préoccupations une dimension informationnelle que les Occidentaux ont longtemps négligée. La cybersécurité est devenue un objet de « grande politique », aiguisant les appétits des grandes puissances, mais aussi d’acteurs privés qui ambitionnent de peser sur l’élaboration des normes de comportement dans le cyberespace.

Quand le digital défie l’État de droit

Cette recension a été publiée dans le numéro d’été de Politique étrangère (n°2/2017). Julien Nocetti, chercheur au Centre Russie/NEI de l’Ifri et spécialiste des questions numériques, propose une analyse de l’ouvrage d’Olivier Iteanu, Quand le digital défie l’État de droit (Eyrolles, 2016, 192 pages).

Digital vs. État de droit

Olivier Iteanu dresse le constat sévère d’une capitulation de l’Union européenne devant les grands acteurs américains du numérique. Sujet comme constat ne sont d’apparence guère inédits : ces dernières années, nombreux sont les auteurs et les praticiens français du numérique à avoir consacré des ouvrages aux dérives, pour l’Europe et la France, de la maîtrise sans partage du numérique par les États-Unis et de ses abus. Les travaux de Pierre Bellanger sur la « souveraineté numérique », de Tristan Nitot sur la surveillance généralisée, d’Éric Sadin sur l’omnipotence des géants du Net, ainsi que plusieurs rapports parlementaires, ont fait éclore une prise de conscience du caractère stratégique de l’économie numérique.

Les fins d’internet

Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (1/2015). Camille Vaziaga propose une analyse de l’ouvrage de Boris Beaude, Les fins d’internet  (Limoges, FYP Éditions, 2014, 96 pages).

beaude_fins internetDans l’ouvrage de Boris Beaude, chercheur au laboratoire Chôros de l’École polytechnique fédérale de Lausanne, « les fins d’internet » désignent aussi bien les finalités qui ont conduit à la naissance de l’internet comme réseau ouvert et décentralisé, que la mise à mort de ses fondements sous la pression de sa commercialisation, des failles sécuritaires et de la régulation étatique.

À sa création, l’internet porte en lui les attentes de chercheurs qui perçoivent la Seconde Guerre mondiale comme le résultat, pour partie, d’un système de communication inefficient.

Web et politique: Paris 2014 et la science électorale américaine

Clémence Pène a écrit un article intitulé La nouvelle science électorale américaine, paru dans le n°2/2013 de Politique étrangère. Depuis l’écriture de cet article, cette chercheuse spécialisée dans le lien entre Internet et politique est devenue responsable de la campagne web d’Anne Hidalgo pour les élections municipales de 2014. Elle répond à trois questions, en exclusivité pour politique-etrangere.com.

PE_2_2013_couvQuelles méthodes de la campagne web de Barack Obama utilisez-vous dans la campagne web d’Anne Hidalgo?

Depuis 2008, la confrontation des campagnes françaises et américaines est un marronnier des médias. Si la comparaison n’est pas toujours appropriée, dans le cas de la campagne web d’Anne Hidalgo, deux importations des techniques de la campagne Obama sont complètement assumées : l’utilisation des outils de gestion de bases de données de l’agence américaine Blue State Digital d’une part, et le développement de l’outil 50+1 pour le porte-à-porte d’autre part. Cela se manifeste en ligne par le recueil actif d’adresses électroniques, la qualification des bases de données par type d’engagement et par quartier sur Blue State Digital qui permet à la campagne une gestion ciblée des mailings. Le porte-à-porte, souvent assimilé aux campagnes américaines, est en réalité une pratique historique du parti socialiste. Dans son utilisation contemporaine, il a été testé en 2010 pendant les régionales en Île-de-France et largement adopté en 2012 avec 5 millions de portes frappées. Le logiciel de ciblage des portes à frapper “50+1” est développé par une agence française. Il ne s’agit donc plus à proprement parler en 2014 d’une “technique Obama”. Pourtant, la “scientifisation” des méthodes de mobilisation web participe d’une dynamique de rationalisation des campagnes électorales qui doit aux précédents américains en matière d’analytics : la campagne Hidalgo porte une grande attention au reporting des opérations terrain et aux rapports de performances web.

Y a-t-il des pratiques américaines qui ne pourraient pas être importées en France, soit pour des raisons culturelles, soit pour des raisons juridiques?

Malgré de nombreuses similarités dans les objectifs et les techniques, les deux campagnes web se déroulent à des échelles et avec des moyens incomparables. Pour des raisons financières, les campagnes françaises, et en particulier municipales, emploient peu de permanents de campagne : la mise en œuvre des techniques de campagne repose ainsi davantage sur l’organisation partisane que sur les professionnels du community organizing. Le plafond limité de la campagne municipale justifie par exemple moins la mise en place de techniques d’online fundraising. Peut-être pour des raisons culturelles, des pratiques telles que les réunions d’appartement et le phoning gardent une visibilité limitée. Par ailleurs, certaines pratiques n’ont pas vocation à être importées parce qu’elles répondent à des objectifs purement américains. On peut citer comme exemple le travail effectué autour de la localisation des bureaux de vote, parfois difficiles à trouver aux États-Unis, y compris le jour du vote. Autre type de pratiques américaines dont la France est heureusement épargnée : l’achat de publicités télévisées hors de prix et le développement de spots vidéo de publicité négatives. Le cadre juridique français est également beaucoup plus tourné vers la protection des données. Hors de question pour la campagne Hidalgo d’acheter des listes d’adresses électroniques : l’épisode de l’achat de bases de données par Nicolas Sarkozy, connu sous le nom du “sarko spam” a marqué négativement la mémoire collective.

Après la campagne des municipales, que deviendront les données récoltées par les équipes web des différents candidats?

Difficile de répondre pour toutes les équipes web. Là encore, le précédent de l’après-campagne d’Obama a montré que la manne des millions d’adresses électroniques contenues dans les bases de données des campagnes pouvait avoir une vie après l’élection. Mais la création de “Organizing for Action” à partir de “Organizing for America” ne semble pas avoir inspiré l’équipe du Président Hollande. La base des primaires socialistes n’a pas, elle non plus, été exploitée de manière optimale. Toutefois, les solides bases numériques d’Anne Hidalgo et de sa principale adversaire ne datent pas d’hier : chacune d’entre elles entretient des centaines de milliers de followers sur Twitter et s’appuie sur une structure autonome de leur parti politique – “Oser Paris” pour Anne Hidalgo, “La France droite” pour la candidate de l’UMP. Ces communautés pourraient donc continuer à vivre en dehors de la campagne parisienne. En ce qui concerne la campagne socialiste, on peut penser que certaines données militantes seront transférées aux sections, dans la plus stricte légalité, dans le respect des règles en vigueur et avec toujours les possibilités d’opt out. Quant aux données statistiques anonymisées (fréquentation, clics, etc.), elles serviront à affiner les modèles et les pratiques pour les campagnes suivantes dans le but de gagner en efficacité.

 

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