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PE 1-2015 en librairie !

Le numéro de printemps 2015 de Politique étrangère, consacré à la défense européenne, vient de paraître !

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À l’Est de l’Europe, au Sud de la Méditerranée, sur le territoire même des Européens, les menaces s’accumulent. Face à cette situation, que peut dire une politique européenne de sécurité et de défense en panne ? À quelles conditions les coopérations de défense pourraient-elles redémarrer ? Et si l’on parle de cohésion face aux échéances politiques, que penser de l’hypothèse d’une sortie de l’Union européenne du Royaume-Uni ? Catastrophe ? Nouveau départ ?

Un numéro qui s’interroge sur tous les environnements de l’Europe et sur notre capacité à prendre les décisions nécessaires – ou à ignorer la réalité du monde.

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Face à une dictature tombée. Les leçons de l’histoire – un manuel

ManuelCette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (2/2014). Nele Katharina Wissmann propose une analyse de l’ouvrage de Sven Felix Kellerhoff, Face à une dictature tombée. Les leçons de l’histoire – un manuel (Berlin, Gedenkstätte Berlin-Hohenschönhausen, 2013, 140 pages).

Trois ans après la chute de Zine el-Abidine Ben Ali, le processus de démocratisation de la Tunisie est sur la bonne voie mais reste fragile. Peu après la révolution, la demande d’une clarification des crimes et délits commis par le parti de Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), a été forte. La justice transitionnelle tunisienne n’a cependant démarré que timidement, n’étant pas considérée comme prioritaire dans cet environnement bouleversé. Parallèlement, les débats autour de la loi de lustration dirigée contre les anciens membres du RCD ainsi que de la politique d’indemnisation en faveur des anciens prisonniers politiques – dont des représentants du parti islamique Ennahda – ont été marqués par de fortes tensions émotionnelles au sein de la société et de l’élite politique tunisiennes.

Dans le cadre du partenariat pour la transformation conclue entre l’Allemagne et la Tunisie, la fondation liée au lieu de mémoire Berlin-Hohenschönhausen, ancienne maison d’arrêt centrale du Service de sécurité d’État de la République démocratique allemande (RDA), accompagne la culture de mémoire tunisienne dans le cadre du projet « Contre l’oubli ». À long terme, ce dernier souhaite mettre en place un lieu de mémoire, selon l’exemple de Hohenschönhausen, qui pourrait par exemple être situé dans les anciennes cellules de torture des services secrets tunisiens, au ministère de l’Intérieur. Dans le cadre du projet, le journaliste Sven Felix Kellerhoff, en charge de la rubrique histoire contemporaine au journal Die Welt, a élaboré un « code de bonnes pratiques » de la maîtrise du passé allemand (Vergangenheitsbewältigung), après 1945 et après 1989. Les cinq sous-parties de l’ouvrage (conservation des preuves, remplacement des élites, action pénale, indemnisation des victimes et sensibilisation) sont brièvement introduites par un état des lieux, puis l’auteur présente des exemples précis du modèle allemand. Dans le chapitre « Conservation des preuves », le lecteur peut par exemple s’informer sur le Berlin Document Center, en charge de l’archivage des fichiers des membres du Parti national-socialiste des travailleurs allemands (Nationalsozialistiche Deutsche Arbeiterpartei, NSDAP). Il peut aussi comprendre l’importance, pour l’office fédéral chargé des dossiers de la Staatssicherheit (Stasi), de la loi sur l’usage des dossiers de la police politique est-allemande. À la fin de chaque chapitre, l’auteur donne un bref aperçu de la justice transitionnelle dans d’autres pays, ouvrant ainsi un débat plus large et dépassant le cadre allemand. Le musée de Robben Island (Afrique du Sud) et la loi de lustration polonaise figurent parmi les exemples cités.

Il était une fois les révolutions

Cette recension est issue de Politique étrangère 2/2013. Marc Hecker propose une analyse de l’ouvrage de Julie Gommes, Il était une fois les révolutions (Sète, Édition de la Mouette, 2013, 110 pages).

00-Gommes-9782917250648FSAu moment de la révolution de 2011, Julie Gommes, jeune journaliste arabophone, vivait en Égypte où elle enseignait le journalisme dans une université du Caire. Elle a aussi couvert le début du soulèvement syrien et voyagé dans la Tunisie postrévolutionnaire. Il était une fois les révolutions décrit son quotidien dans une période agitée, ses rencontres, ses amitiés, ses souffrances. Ce quotidien, écrit-elle, est « trop insignifiant » pour être « vendu aux médias ». Il est pourtant loin d’être dénué d’intérêt.
Un des mérites de cet ouvrage, qui se lit comme un roman d’apprentissage, est de lever le voile sur les coulisses du métier de journaliste. Comment passer la frontière d’un pays au bord de la guerre civile ? Comment échapper aux moukhabarat ?

La révolte en réseau : le « printemps arabe » et les médias sociaux

Article paru dans Politique étrangère n° 1/2012 et rédigé par David M. Faris, professeur adjoint de science politique à la Roosevelt University. Son ouvrage Dissent and Revolution in a Digital Age: Social Media, Blogging and Activism in Egypt (Londres, I.B.Tauris) paraîtra en septembre 2012.

La question du rôle des médias sociaux dans le « printemps arabe » est bien souvent traitée de manière caricaturale. Certains n’ont pas hésité à parler de « révolution Facebook », « révolution Twitter » ou « révolution WikiLeaks », présentant l’avènement du Web social comme la cause principale du déclenchement des révoltes. D’autres, au contraire, ont expliqué qu’Internet n’avait joué aucun rôle. La question des rapports entre médias sociaux et changement politique requiert une approche plus nuancée, se fondant plus spécifiquement sur les cas de l’Égypte et de la Tunisie. Avant de se focaliser sur le « printemps arabe », un détour par le mouvement de contestation en Iran en 2009 s’impose.

L’expérience iranienne de 2009 et ses premières leçons

L’expression « révolution Twitter » a émergé en 2009, au moment de la vague de protestation consécutive à la réélection du président Mahmoud Ahmadinejad. Au cours des premiers jours de la révolte, Twitter est devenu le moyen essentiel, pour les observateurs internationaux, d’obtenir des informations concernant les événements en Iran. L’activisme numérique d’un petit groupe de militants iraniens « tweetant » en anglais a poussé certains analystes à mettre sur le compte de Twitter l’organisation de la révolte elle-même et à présenter le site de microblogging comme l’unique moyen pour les Iraniens de se tenir au courant ce qui se passait. Or, les spécialistes de l’Iran se sont presque immédiatement opposés à l’idée de considérer le « mouvement vert» comme une « révolution Twitter ». Ils ont soutenu que la mobilisation autour de Mir Hossein Moussavi, candidat opposé au président sortant, était à mettre sur le compte d’une coalition antérieure, unissant organismes de la société civile et militants de l’opposition, dans le but de « chasser Ahmadinejad du pouvoir[1] ». D’autres ont souligné que l’étude des statistiques d’utilisation de Twitter en Iran ne permettait pas d’accréditer la thèse selon laquelle ce site serait à l’origine du soulèvement[2]. Enfin, la répression implacable du « mouvement vert » a conduit nombre d’observateurs à récuser non seulement le rôle de Twitter dans le pays, mais plus généralement sa capacité à être vecteur de changement politique dans des États autoritaires. Les événements d’Iran auraient ainsi « démontré à la fois le potentiel et les limites de la technologie libératrice[3] ». Certaines oraisons funèbres du « mouvement vert » laissaient transparaître une certaine satisfaction de la part de ceux qui avaient manifesté dès le début leur scepticisme quant à la capacité des médias sociaux à produire des changements politiques fondamentaux.
En 2010, dans la foulée de la répression en Iran, les thèses des sceptiques ont tenu le haut du pavé. Parmi les défenseurs de ces thèses, Evgeny Morozov[4] a acquis une visibilité particulière. Il n’a eu de cesse d’expliquer que les efforts de promotion des médias sociaux comme réponse aux frustrations démocratiques dans les pays autoritaires resteraient vains. Dans son ouvrage The Net Delusion[5], il écrit : « Espérer qu’il suffise d’ouvrir tous les réseaux […] pour rendre une transition vers la démocratie plus facile ou plus probable est illusoire[6]. » Dans la même veine, Malcolm Gladwell a expliqué, dans un article du New Yorker, que les médias sociaux ne pouvaient pas mener à des mobilisations de masse en raison de la faiblesse et de la volatilité des liens créés sur le Web[7]. Selon lui, les individus sont susceptibles de prendre des risques en voyant leurs proches faire de même, mais ils ne sauraient mettre leur vie en danger en suivant le seul exemple d’une lointaine connaissance rencontrée sur Internet. Les sceptiques expliquent également – et c’est une évidence – que d’un point de vue historique, l’absence de médias sociaux n’a pas empêché le déroulement de nombreuses révolutions. En 1979, des millions de personnes se sont mobilisées en Iran alors que Twitter n’existait pas. Deux ans plus tôt, les Égyptiens n’avaient pas eu besoin de pages Facebook pour descendre dans la rue et protester massivement contre l’augmentation du prix des denrées alimentaires. En d’autres termes, l’existence des médias sociaux n’est ni nécessaire, ni suffisante pour inciter à l’action collective dans les sociétés non démocratiques.
À la fin de l’année 2010, après le musellement du« mouvement vert » en Iran et alors que la situation des Droits de l’homme ne semblait guère s’améliorer en Égypte et en Chine, il était difficile de trouver le moindre exemple susceptible d’étayer la théorie du potentiel libérateur des médias sociaux. De fait, après quasiment une décennie d’activisme numérique, les blogueurs égyptiens n’avaient pas réussi à faire évoluer le régime. La contestation était bel et bien présente : de 2004 à 2010, les militants du groupe d’opposition Kefaya et leurs alliés dans la blogosphère égyptienne ont été à l’origine de centaines de manifestations dans les rues du Caire et d’autres villes d’Égypte[8]. On peut même dire qu’ils ont banalisé la pratique des manifestations pendant cette période, même si, à l’époque, la plupart des Égyptiens se contentaient d’observer prudemment et de loin. Ces militants-blogueurs ont également permis de faire éclater les plus importants scandales de la dernière décennie, dont des affaires d’agressions sexuelles au Caire en 2006 et de pratiques de torture dans les prisons. Toutefois, en dépit de l’existence de solides communautés d’activistes numériques qui utilisaient tous les moyens – de Flickr à Facebook en passant par Twitter – pour partager, témoigner et mobiliser, l’avenir de la démocratie égyptienne paraissait sombre. Et la succession d’Hosni Moubarak promise à son fils Gamal…

1. A. Afshari et G. H. Underwood, « The Green Wave », Journal of Democracy, vol. 20, n° 4, octobre 2009, p. 6-10.
2. E. Morozov, The Net Delusion: The Dark Side of Internet Freedom, New York, PublicAffairs, 2011.
3. L. Diamond, « Liberation Technology », Journal of Democracy, vol. 21, n° 3, juillet 2010, p. 69-83.
4. Evgeny Morozov est un jeune chercheur originaire du Belarus qui a notamment été « Yahoo! Fellow » à l’université de Georgetown (ndlr).
5. Cet ouvrage a fait l’objet d’une recension dans Politique étrangère, vol. 76, n° 4, hiver 2011 (ndlr).
6. E. Morozov, op. cit.
7. M. Gladwell, « Small Change: Why the Revolution Will Not Be Tweeted », The New Yorker, 4 octobre 2010.
8. R. El-Mahdi, « Enough! Egypt’s Quest for Democracy », Comparative Political Studies, vol. 42, n° 8, 2009, p. 1011-1039.

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