Auteur de l’article « La Turquie, entre coup d’État et référendum » paru dans le numéro d’été 2017 de Politique étrangère (2/2017), Ahmet Insel, chroniqueur au quotidien Cumhuriyet et ancien professeur à l’université Galatasaray d’Istanbul, répond à trois questions en exclusivité pour politique-etrangere.com.

1) Quelles ont été les grandes étapes de la vie politique turque depuis le coup d’État de juillet 2016 ?
La proclamation de l’état d’urgence, quatre jours après le coup d’État avorté, a ouvert la voie au règne général de l’arbitraire. Le gouvernement, en violant les limites que la Constitution impose au champ de compétence de l’état d’urgence, utilise depuis lors ce pouvoir exceptionnel pour purger massivement l’administration des éléments indésirables, et fermer des écoles, des universités, des journaux, des fondations et des associations par simple décision administrative, sans aucun recours possible. La seconde étape a été le projet d’amendement constitutionnel, préparé à la va-vite avec le soutien inattendu du leader du parti d’extrême droite, le Parti d’action nationaliste (MHP), qui instaure un régime hyper-présidentiel et donne au président élu tous les pouvoirs, y compris le contrôle de la justice et la possibilité de gouverner par décrets.
« En novembre 2013 le maître de la Turquie, Recep Tayyip Erdoğan, recevait avec les honneurs Massoud Barzani, président du Gouvernement régional du Kurdistan (GRK) irakien, à Diyarbakır, « capitale » kurde de Turquie. Le même Barzani, qui tient efficacement tête au gouvernement de Bagdad, était quelques mois plus tôt à Paris le héros d’une campagne d’affichage vantant le Kurdistan irakien comme « îlot de stabilité au Moyen-Orient ». Au même moment, d’autres Kurdes commençaient à découper en Syrie des enclaves pacifiques en marge de la guerre civile, combattant au passage des groupes djihadistes craints de tous. En Iran même, les guérilleros du Parti de la vie libre au Kurdistan (Partiya Jiyana Azad a Kurdistanê, PJAK), cousins du Parti des travailleurs du Kurdistan (Partiya Karkerên Kurdistan, PKK), semblent hésiter sur la tactique à privilégier face à la répression des mollahs.
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