Catégorie : Les auteurs s’expriment Page 82 of 83

Comment fonctionnent les agences de notation ?

Lors de la présentation du numéro du printemps 2012 de Politique étrangère à la librairie Pedone, Norbert Gaillard (docteur en économie, Sciences Po et Princeton) explique le fonctionnement des agences de notation.


Comment fonctionnent les agences de notation ? par Ifri-podcast

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L’islam dans la révolution syrienne : 3 questions à Thomas Pierret

 Thomas Pierret, maître de conférences en islam contemporain à l’université d’Édimbourg, répond à trois questions en exclusivité pour politique-etrangere.com.
Il vient de publier un ouvrage intitulé Baas et islam en Syrie. La dynastie Assad face aux oulémas (Paris, PUF, 2011). Il a également rédigé un article intitulé “Syrie : l’islam dans la révolution” paru dans le n° 4/2011 de Politique étrangère.

Quel rôle l’islam joue-t-il dans la révolution en cours en Syrie ?

Il faut distinguer ici entre trois niveaux : culturel, idéologique et organisationnel. L’islam en tant que référent culturel joue un rôle très important dans la révolution syrienne, un phénomène qui reflète la piété d’une grande partie de la société. Les mosquées ont été parmi les tout premiers foyers de manifestations en mars 2011. Pour se donner du courage, les protestataires ont régulièrement entonné des slogans comme « Dieu est grand » ou « Ô Dieu nous n’avons que toi ». Des prières collectives ont été organisées durant les manifestations. En revanche, l’islam en tant qu’idéologie politique articulée (islamisme) est très peu présent dans le discours révolutionnaire : même l’opposition islamiste ne met pas l’accent sur les notions d’État islamique et de charia, alors que ces dernières étaient centrales lors du précédent soulèvement (1979-1982). Enfin, par niveau organisationnel, je fais référence au rôle des leaders religieux et des mouvements islamiques. Certains oulémas (hommes de religion) ont été à l’avant-plan en osant critiquer la répression lors de leurs sermons du vendredi, en démissionnant de leurs fonctions en signe de protestation ou, plus rarement, en devenant membres de comités révolutionnaires locaux. Quant aux mouvements islamistes tels que les Frères musulmans, ils avaient été à peu près complètement éradiqués sous le Ba’th. Par conséquent, si leur poids au sein de l’opposition en exil est considérable, il s’est révélé assez négligeable sur le terrain pendant les 12 premiers mois du soulèvement.

Dans la sphère islamique, les Frères musulmans sont-ils les principaux acteurs de la contestation ?

Jusqu’à présent, les acteurs religieux contestataires les plus visibles à l’intérieur du pays ont été les oulémas qui, à la différence des Frères Musulmans, avaient pignon sur rue et bénéficiaient donc d’une grande notoriété. Les  Frères musulmans occupent une position très marginale sur le terrain puisque cela fait près de 30 ans qu’ils n’ont plus de structures organisées. Ils essaient actuellement de se reconstruire une base populaire en Syrie par le biais de l’envoi d’aide humanitaire et militaire à l’opposition. La répression féroce de l’islam politique par le Ba’th au cours des dernières décennies a également contraint à la marginalité les autres groupes islamistes comme le Parti de la libération islamique, partisan du rétablissement immédiat du Califat, ou le Courant islamique indépendant, un réseau informel d’intellectuels islamistes modérés.
La situation est très différente au sein de l’opposition en exil. Là, s’appuyant sur l’ampleur de leurs réseaux transnationaux et sur leur expérience du travail politique, les Frères musulmans affichent des prétentions hégémoniques. Ils occupent environ un quart des sièges du Conseil national syrien, dont ils constituent la force dominante. Cette position de force est toutefois contestée jusque dans la mouvance islamiste. Elle l’est notamment par le Mouvement Justice et Développement, un parti « démocratique et conservateur » comparable à l’AKP turc, fondé à Londres en 2006. Elle l’est aussi par des islamistes qui n’ont quitté la Syrie qu’après mars 2011 (Haytham al-Malih ou ‘Imad al-Din al-Rashid, fondateur du Courant national syrien) et estiment donc qu’ils sont au moins aussi légitimes que les Frères, basés à l’étranger depuis au moins 30 ans.

Ayman al-Zawahiri a déclaré qu’il soutenait la révolution syrienne. En outre, un groupe djihadiste, Jabhat Al-Nusra Li-Ahl Al-Sham, s’est récemment constitué et des rumeurs circulent au sujet de la libération d’Abu Musab al-Suri. Faut-il craindre que la Syrie devienne un nouveau front d’Al-Qaida ?

La question est éminemment politique puisque le régime syrien use de cette thématique pour délégitimer l’opposition. Après son échec en Irak, il est logique qu’Al-Qaida cherche en Syrie un nouveau terrain de djihad. De ce point de vue, le pays constitue une cible idéale puisqu’un mouvement de contestation majoritairement sunnite y est écrasé dans le sang par un régime alaouite et allié à l’Iran chiite, le tout sous le regard impuissant des pays occidentaux. Malgré cela, Al-Qaida n’est pas (encore ?) devenue un acteur significatif dans le conflit. L’écrasante majorité des opérations menées contre les forces du régime le sont par des brigades se réclamant de l’Armée syrienne libre. Or ces dernières usent d’une symbolique islamo-nationaliste très différente du salafisme-djihadisme d’Al-Qaida. Les efforts de Jabhat al-Nusra (« le Front du soutien ») pour se donner une présence médiatique sont pour l’instant pathétiques : il s’agit d’une une poignée de vidéos de mauvaise qualité et contenant peu d’images originales, si bien qu’elles ne permettent pas de lever les doutes concernant la réalité de cette organisation. L’administration américaine a pointé Al-Qaida du doigt suite aux attentats menés contre les sièges des renseignements syriens à Damas et Alep en décembre et janvier dernier. Les Américains ne savent en réalité pas grand-chose des responsables de ces attentats et l’accusation paraît surtout destinée à permettre à Washington de se laver les mains du dossier syrien. Al-Qaida est certes un coupable potentiel mais les attaques peuvent tout aussi bien être le fait d’opposants non djihadistes. On ne peut pas non plus exclure une manipulation du régime sur le modèle algérien.

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1 an après Fukushima : 3 questions au directeur général adjoint de l’AIEA

Denis Flory est directeur général adjoint de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), dont il dirige le département de sûreté et de sécurité nucléaire. Il a rédigé un article intitulé  » Coopération internationale et sûreté nucléaire  » paru dans le n° 4/2011 de Politique étrangère. Il répond à trois questions, en exclusivité pour politique-etrangere.com.

Comment expliquer la catastrophe de Fukushima ?

Il faudra plusieurs années pour tirer toutes les leçons de l’accident survenu à la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Pour mémoire, il a fallu six ans pour évaluer l’état du combustible à l’intérieur du réacteur de la centrale de Three Mile Island [suite à l’incident de 1979]. Des premières leçons à caractère global sont cependant déjà disponibles, tirées des rapports du gouvernement et de la commission d’enquête japonais, des rapports des trois missions internationales envoyées par l’AIEA au Japon et des diverses communications des autorités et des experts nippons.
La première leçon est que, pour des raisons d’organisation générale de la sûreté au Japon, les connaissances récentes sur le risque sismique et les tsunamis associés, disponibles au sein de la communauté scientifique japonaise, n’ont pas été prises en compte. Au Japon, seuls les enregistrements sismiques récents (limités au XIXe siècle) ont été utilisés par l’exploitant TEPCO pour définir le séisme et le tsunami contre lesquels la centrale devait être protégée, contrairement aux normes de sûreté édictées par l’AIEA, qui demandent de remonter jusqu’à l’ère préhistorique et d’étudier les caractéristiques géologiques. L’absence d’un contrôle indépendant et fort de l’autorité de sûreté sur cette évaluation a conduit à sous-estimer la hauteur et la force du tsunami. Par ailleurs, la conception de la centrale (élévation au-dessus de l’eau des générateurs de secours et de leurs connections, absence d’étanchéité des portes des bâtiments, etc.) a conduit à perdre simultanément toutes les protections par un effet  » falaise « , une fois que la protection contre le tsunami a été débordée. À cela, il faut ajouter le faible niveau de préparation à la gestion des accidents graves au sein de la centrale de Fukushima et plus largement au niveau national.

Comment la coopération internationale en matière de sûreté nucléaire a-t-elle évolué depuis l’accident de Fukushima ?

L’accident de Fukushima a créé un choc en rappelant qu’un accident nucléaire est toujours possible. La communauté internationale s’est fortement mobilisée pour renforcer la sûreté au niveau mondial sur deux axes : rendre nettement plus improbable la survenue d’un accident dans une centrale nucléaire et renforcer la préparation des États et des exploitants nucléaires à la gestion d’un accident, afin d’en minimiser les conséquences pour l’homme et l’environnement s’il survenait.
La majorité des États dotés de centrales nucléaires a entamé un processus d’évaluations complémentaires de sûreté (stress tests), afin d’estimer la résistance de leurs centrales à des événements extrêmes, combinés, tels que la perte totale et prolongée de l’alimentation électrique ou du refroidissement.
Les services d’examen par les pairs organisés par l’AIEA, que ce soit pour évaluer l’efficacité des autorités de sûreté, la sûreté en exploitation des centrales nucléaires et leur conception, la sûreté des sites, ou encore le niveau de préparation à la gestion des situations d’urgence radiologique, ont été renforcés depuis l’accident. Ils font l’objet d’une attention et d’une demande accrue de la part des États membres de l’AIEA.
Enfin, la coopération entre l’AIEA et les organisations intergouvernementales compétentes (transport, météorologie, réseau de mesures de radioactivité, etc.) ou encore avec l’association mondiale des exploitants de centrales nucléaires a été renforcée.

Un nouveau Fukushima est-il possible ?

Les 152 États membres de l’AIEA ont adopté en septembre 2011 un ambitieux plan d’action sur la sûreté nucléaire dont la mise en œuvre va renforcer le cadre global de la sûreté, à tous les niveaux : national, régional et international. Ce plan concerne les États, les autorités de sûreté, les exploitants nucléaires, les organismes scientifiques de sûreté… de fait, toutes les parties prenantes de l’énergie nucléaire.
Les domaines pris en compte par ce plan d’action couvrent les normes internationales de sûreté, le cadre légal international, la formation et le maintien des compétences, la préparation à la gestion des situations d’urgence, la communication et la transmission des informations.
L’un des éléments les plus importants de ce plan d’action est le renforcement de la transparence sur les missions d’évaluation par les pairs, qui est un puissant levier pour une amélioration continue de la sûreté.
Je suis convaincu que la sûreté sort renforcée des leçons tirées de l’accident de Fukushima. Il ne faudra surtout pas les oublier ; seule une amélioration constante de la sûreté peut éviter la survenue d’accidents aux conséquences dommageables pour l’homme et l’environnement.

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Le « printemps arabe » et les réseaux sociaux : 3 questions à David Faris

David Faris est professeur adjoint de science politique à la Roosevelt University. Son ouvrage Dissent and Revolution in a Digital Age: Social Media, Blogging and Activism in Egypt (Londres, I. B. Tauris) paraîtra en septembre 2012. Il publiera un article (en français) sur les médias sociaux et le « printemps arabe » dans le n°1/2012 de Politique étrangère. En attendant la parution de cet article, il répond à trois questions (en anglais), en exclusivité pour politique-etrangere.com.

What role did social networks play in the 2011 Egyptian revolution?

Online social networks were critical in building opposition to the Mubarak regime from 2003 until 2011. These networks first operated through blogs, and subsequently through more sophisticated social media platforms like Facebook and Twitter. Through these social networks, social dissidents helped forge and refine a repertoire of contention, including symbols, protest tactics and organizations, and were able to help Egyptian activists coalesce around a small number of human rights and democracy issues that mostly transcended existing political divisions in the country. It was around these issues that revolutionaries united in 2011. Again, this was all happening years before the uprising, and served as the foundation for the kinds of organizing and planning that took place prior to the revolution. We know that the date of the uprising was chosen by digital activists from the April 6th and We Are All Khaled Said movements, both of which were digital in origin, and many of the key strategists of the day’s events were longstanding digital activists and journalists. Without the key contributions of those activists and networks, there would have been many thousands fewer Egyptians committed to protesting on January 25th,  and it is quite uncertain whether the day’s events, and thus the uprising, would have unfolded the same way. This is not, of course, to say that online social networks were the only key causal contributor to the Egyptian uprising, or that they were even the most important factor once the protests took on a life of their own. On the contrary, grassroots organizing, a labor uprising, and key defections inside the regime itself may have been more important in bringing the crisis to conclusion than anything the activists did after January 25th. But this should not lead us to obscure the leading role of digital activists. So this is the first model – a long-term digital activist movement that builds a small but tight-knit community of dissidents, an uprising deliberately plotted by those same digital activists, and a street mobilization that ultimately eclipses the capabilities and hopes of the smaller community of organizers.

What role did social networks play in the 2011 Tunisian revolution?

The Tunisian case is a fascinating contrast, because unlike the Egyptian regime, the Tunisian government heavily censored and controlled the Internet. When I spoke with activists last summer, they described it as a more or less total blackout one day, and then complete freedom after Ben Ali’s departure. The point is that in Egypt the government’s (mostly) hands-off attitude allowed a culture of online dissent and protest to evolve at the same time as an offline protest movement developed to challenge the regime. This would have made us, prior to the revolution, much more likely to expect an uprising in Egypt than Tunisia, but it was in Tunisia where the Arab Spring started. In Tunisia, the most important blog, Nawaat, was largely hosted and administered from abroad, due to the danger of openly using the Internet for dissent. People could get around the government’s censorship, but many ordinary people did not bother, and thus Tunisia’s anti-regime movement was much more inchoate when the uprising struck. Nevertheless, Ben Ali’s regime had allowed citizens to use Facebook, and it was the major social media platforms which played an important role in the uprising. Unlike Egypt, the uprising was not plotted openly online by digital activists, but of course instigated by the immolation of a street vendor. Once Mohammed Bouazzizi’s death brought Tunisians into the streets, however, online social networks played an important role in distributing information from one part of the country to the next, in connecting activists to one another, and in garnering support and sympathy from international actors and NGOs. And I think it became clear after the uprising that more people had been reading Nawaat and surreptitiously using the Internet for dissent than anyone realized. So this is a second model – a country smothered by digital censorship and a revolution that is sparked by something in the street and then assisted by digital tools and online social networks. I think what should be clear is that both models — the Egyptian and Tunisian —  are possible depending on the censorship and filtering strategies adopted by particular authoritarian regimes.

Are future revolutions necessarily going to be “networked revolts”?

Future revolutions can hardly avoid the necessity of wisely deploying and using the new tools and strategies of networked digital activism. This is hard for us to see or properly understand, because digital tools have gone from being a novelty or a curiosity to being completely embedded in the routines and lives of ordinary people even in some of the world’s poorest countries. And this has all happened in the space of about twenty years. For most young people in most parts of the world, the curiosity now would be to make a decision not to use Twitter and Facebook to organize a protest. It would be unthinkable. Particularly in large, polyglot societies whose popular cultures are increasingly characterized by narrowcasting — the funneling of information, news and entertainment to smaller audiences based on taste or preference — our broad online social networks are really the only way for information, ideas and calls to action to circulate efficiently and beyond the immediate scope of authoritarian control. Even countries with rigid architectures of online control, like China and Iran, have seen these technologies used against them. This is not to say that activists will always gain the upper hand, but rather that across the world, online social networks have become the default tool of dissent against authoritarian regimes, and those regimes have yet to find a reliable way to fight back and win.

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