Catégorie : Sélection d’archives Page 14 of 41

Les articles rédigés par de grands noms au cours des 75 ans d’existence de PE

L’évolution de la doctrine stratégique aux États-Unis, Henry Kissinger (1962)

En cette période de confinement liée à l’épidémie de coronavirus, la rédaction de Politique étrangère vous offre de (re)lire des textes qui ont marqué l’histoire de la revue. Nous vous proposons aujourd’hui un exposé improvisé prononcé par Henry Kissinger devant les membres du Groupe d’études stratégiques du C.E.P.E. en 1962, intitulé « L’évolution de la doctrine stratégique aux États-Unis », et publié dans Politique étrangère (n°2/1962).

Depuis que je suis à Paris, après cinq semaines passées en Orient, j’ai eu de nombreuses conversations avec des amis français et je dois avouer que je suis frappé par l’étendue du désaccord et de l’incompréhension qui se sont développés entre nos deux pays. Je ne prétends pas fixer les responsabilités de cet état de choses. Je crois cependant qu’étant donné le temps que nous vivons, on ne peut concevoir d’avenir pour l’Occident sans la plus étroite collaboration entre les États-Unis et la France. Je ne puis concevoir que l’un ou l’autre de nos deux pays puisse se développer sans l’autre. Je crois que ni l’un ni l’autre de nos deux pays ne pourra éviter la destruction, si l’autre est détruit. Je pense que les dangers auxquels nous aurons à faire face ne seront pas seulement le fait de l’Union soviétique ou de la Chine communiste. Je crois qu’au cours des dix ou quinze années qui sont devant nous, toutes les nations occidentales devront tenir compte d’une menace très sérieuse de la part de nouvelles nations, menace qui doit être étudiée avec le plus grand sérieux. Dans ces conditions, nous ne disposons pas de tant de ressources que nous puissions nous permettre de mener entre nous de guerre civile intellectuelle.

Les « invariants » de la politique étrangère de la France, Jean-Baptiste Duroselle (1986)

En cette période de confinement liée à l’épidémie de coronavirus, la rédaction de Politique étrangère vous offre de (re)lire des textes qui ont marqué l’histoire de la revue. Nous vous proposons aujourd’hui un texte de Jean-Baptiste Duroselle, « Les « invariants » de la politique étrangère de la France », publié dans Politique étrangère en 1986.

Albert Demangeon, André Siegfried : j’ai eu le privilège d’être l’élève du premier, mort au moment de la défaite française, et, sans l’être directement, du second, j’ai subi profondément son influence. Et voici mon problème. Ces deux très grands géographes eussent-ils accepté la notion d’« invariant » ? Parce que l’homme est l’homme, avec la même structure cérébrale depuis 35 000 ans, il y a peut-être pour lui des « régularités » : la guerre périodique, la dissémination des techniques, etc. Mais l’homme français est-il déterminé de quelque façon par cette réalité géographique qu’est la France ? Certes oui ! aurait répondu Ratzel, le grand géographe allemand de l’« espace », qui fleurissait avant 1914, et s’est trouvé, sans le vouloir, être l’inspirateur des géopoliticiens. Je pense que Demangeon et Siegfried auraient répondu non !, le second peut-être moins fermement que le premier.

Raymond Aron et la théorie des relations internationales, Stanley Hoffmann (1983)

En cette période de confinement liée à l’épidémie de coronavirus, la rédaction de Politique étrangère vous offre de (re)lire des textes qui ont marqué l’histoire de la revue. Nous vous proposons aujourd’hui un texte de Stanley Hoffmann, intitulé « Raymond Aron et la théorie des relations internationales », publié dans Politique étrangère en 1983. Immédiatement après la mort de Raymond Aron, Stanley Hoffmann, professeur de sciences politiques et de civilisation française à Harvard, offrait à Politique étrangère une synthèse de sa pensée, rendant ainsi hommage à une vision internationale d’un libéralisme lucide et réaliste.

L’ampleur de l’œuvre de Raymond Aron a toujours fait le désespoir de ses commentateurs – et de ses disciples. On peut s’attendre à la publication de divers textes inédits ; néanmoins, hélas, cette œuvre est désormais achevée. Ce qui devrait permettre d’étudier enfin, en profondeur, la contribution scientifique qu’elle a apportée – de séparer en quelque sorte les deux activités que Raymond Aron a menées de concert et a souvent entremêlées : l’activité proprement journalistique, commentaires d’une actualité qu’il se sentait le devoir d’élucider et d’interpréter, et l’activité du théoricien, philosophe de l’histoire, sociologue des sociétés contemporaines, ou critique de la pensée politique et sociale des grands auteurs.

La politique étrangère d’une société primitive, par Claude Lévi-Strauss (1949)

En cette période de confinement liée à l’épidémie de coronavirus, la rédaction de Politique étrangère vous offre de (re)lire des textes qui ont marqué l’histoire de la revue. Nous vous proposons aujourd’hui un texte de Claude Lévi-Strauss, intitulé « La politique étrangère d’une société primitive », publié dans Politique étrangère en 1949. Il  y analyse le rapport à l’étranger de différentes tribus, dont les Nambikwara du Brésil, connus des lecteurs de Tristes tropiques (1955). Ces tribus ne se caractérisent pas par une « agressivité innée » et coopèrent de différentes manières – notamment par des systèmes de dons qui s’apparentent à du commerce – avec des éléments externes, que ce soit des membres d’autres tribus ou des Occidentaux.

Le sujet du présent article présente, dans son énoncé même, quelque chose de paradoxal. Nous ne pensons pas spontanément qu’une société primitive, ou du moins cet ensemble d’une extraordinaire diversité que nous groupons, de façon un peu maladroite, sous ce vocable qui ne signifie ‘pas grand chose’, puisse avoir une politique étrangère. La raison en est que les sociétés primitives, ou prétendues telles, nous apparaissent comme des sortes de conservatoires, des musées vivants ; de façon plus ou moins consciente, nous n’imaginons pas qu’elles auraient pu préserver des genres de vie archaïque ou fort éloignés des nôtres propres, si elles n’étaient restées comme autant de petits mondes clos, complètement isolés de tous les contacts avec l’extérieur. C’est seulement dans la mesure où elles représenteraient des expériences isolées du reste de l’univers social qu’elles pourraient prétendre au titre de « sociétés primitives ».

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