Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (2/2014). Milena Jakšić propose une analyse de l’ouvrage de Stephanie Hepburn et Rita J. Simon, Human Trafficking around the World. Hidden in Plain Sight, (New York, NY, Columbia University Press, 2013, 552 pages).
À partir d’une enquête menée dans 24 pays, cet ouvrage décrit les politiques de lutte contre la traite des êtres humains dans une perspective critique. Il opère plusieurs déplacements par rapport à la littérature usuelle sur la traite tout en adoptant un ton dépassionné, loin des postures sensationnalistes ou misérabilistes. Le premier déplacement concerne la définition même de la traite. Alors que la plupart des travaux se limitent à la seule étude de la traite aux fins d’exploitation sexuelle, ce travail se propose d’élargir la focale en se penchant sur une autre forme d’asservissement, celle du travail forcé. De ce fait, les auteurs insistent sur la nécessité de garder une définition large de la traite, comme le préconise d’ailleurs le Protocole des Nations unies adopté à Palerme en 2000. Suivant ce Protocole, la notion de traite recouvre toute forme de marchandisation du corps humain à des fins d’exploitation. L’accent doit donc être mis sur les notions d’esclavage et d’exploitation, indépendamment des moyens utilisés. Concernant le travail forcé, le constat ici dressé est sans équivoque : non seulement cette forme de traite fait rarement l’objet de poursuites pénales, mais elle est dans la grande majorité des cas ignorée, lorsqu’elle n’est pas simplement niée. Les victimes de ce type d’exploitation sont considérées, quant à elles, comme des travailleurs illégaux, éventuellement expulsables vers leur pays d’origine.
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