Mois : juin 2014

Life, Death and Growing Up on the Western Front

Life and Death

Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (1/2014). Anne Geslin-Ferron propose une analyse de l’ouvrage d’Anthony Fletcher, Life, Death and Growing Up on the Western Front, (New Haven, CT, et Londres, Yale University Press, 2013, 352 pages).

Tout commence par la découverte de 243 lettres écrites par le grand-père d’Anthony Fletcher à sa femme, depuis le front de l’Ouest en France durant la Grande Guerre. D’autres sources de première main, imprimées ou non, lui permirent de construire ce livre sur l’expérience physique et émotionnelle d’un petit groupe de soldats britanniques.

Cet ouvrage se situe à la confluence de plusieurs thématiques actuelles : l’histoire des représentations et des mentalités, l’histoire sociale, en l’occurrence le point de vue de cinq « simples soldats » et de 12 officiers, l’histoire chronologico-thématique de la guerre.

L’auteur rappelle d’abord que l’absence de service militaire ne détourne pas les Britanniques de l’engagement patriotique. Sans conteste, l’opinion bascule rapidement du pacifisme à la belligérance. Les engagés volontaires partent avec l’enthousiasme et la détermination de faire la guerre pour une cause juste : l’avenir de la civilisation.

The Great War: 1914-1918

Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (1/2014). Romain Fathi propose une analyse de l’ouvrage de Peter Hart, The Great War: 1914-1918 , (Londres, Profile Books, 2013, 544 pages).

great warÀ l’approche du centenaire de la Grande Guerre, Peter Hart, de l’Imperial War Museum, nous livre une nouvelle somme d’histoire militaire. Rien de nouveau sur le fond, et finalement peu d’incursions dans l’historiographie du conflit, mais au total un bel effort de synthèse. The Great War n’est assurément pas une publication universitaire et ne se revendique pas comme telle. Des notes de fin d’ouvrage et une bibliographie minimalistes, ainsi qu’un ton direct, indiquent la cible grand public privilégiée par l’auteur, comme à son habitude. Certaines de ses publications antérieures ont d’ailleurs constitué un réservoir important pour le présent ouvrage[1]. Pourtant, le volume n’est pas dénué d’intérêt pour ceux qui souhaiteraient rafraîchir leurs connaissances sur l’histoire militaire du conflit à l’aube d’un déferlement commémoratif déjà amorcé.

The Great War s’ouvre sur un chapitre aux penchants parfois téléologiques sur les origines du conflit et se clôt par la victoire alliée sur le front ouest en novembre 1918. Entre-temps, le lecteur aura le loisir de parcourir tous les « fronts » de la Grande Guerre, de la Mésopotamie au Pacifique, aux fronts de l’Est, et tous les espaces du conflit, sur et sous terre, sur mer et dans les airs. L’auteur fait preuve d’une certaine érudition et d’une capacité de synthèse impressionnante.

Deutschland Heer und Marine im Ersten Weltkrieg

OldenbourgCette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (1/2014). Julia Heinemann propose une analyse de l’ouvrage de Christian Stachelbeck, Deutschlands Heer und Marine im Ersten Weltkrieg (Munich, Oldenbourg Verlag, 2013, 224 pages).

Chercheur au Centre d’histoire militaire et des sciences sociales de l’armée allemande (Zentrum für Militärgeschichte und Sozialwissenschaften der Bundeswehr), Christian Stachelbeck propose une riche synthèse de l’histoire de l’armée de Terre et de la Marine allemandes pendant la Première Guerre mondiale. Comportant photographies, cartes et tableaux, l’ouvrage s’ouvre sur une description de l’état de la recherche et de l’évolution de l’histoire militaire. Divisé en quatre grands chapitres (La pensée militaire et la conduite de la guerre ; Structures ; Armement ; Quotidien, expériences de guerre, motivations), le livre retrace, outre les étapes de la guerre en Europe, le déroulement des événements dans les colonies allemandes.

Parmi les raisons de l’effondrement de l’Allemagne, l’auteur pointe aussi bien la supériorité des pays de l’Entente que l’illusion largement partagée d’une guerre courte. S’y ajoutent les erreurs commises par les gradés (jouissance de privilèges non justifiés, favoritisme pour le ravitaillement et les permissions) : autant d’éléments qui déconstruisent le mythe d’une communauté du front unie, englobant toutes les couches de la société, mythe véhiculé ensuite par la littérature, et notamment par Ernst Jünger.

Juli 1914. Eine Bilanz

54e7202205Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (1/2014). Hans Stark propose une analyse de l’ouvrage de Gerd Krumeich, Juli 1914. Eine Bilanz (Paderborn, Ferdinand Schöningh, 2014, 362 pages).

Historien, auteur de nombreux ouvrages sur la Première Guerre mondiale, cofondateur de l’Historial de la Grande Guerre de Péronne, Gerd Krumeich livre une analyse extrêmement riche et minutieuse de la crise de juillet 1914, complétée par 50 « documents clés » choisis par l’auteur. Son ouvrage s’appuie sur un très grand nombre de documents, mais aussi sur les ouvrages publiés après la Grande Guerre (Renouvin, Fay, Schmitt, Albertini), après la Seconde Guerre mondiale (Fischer, Mommsen), ainsi que sur les études plus récentes (Mombauer, Joll, Clark, etc.) consacrées à l’origine de la guerre.

Krumeich réfute les thèses de Fritz Fischer selon lesquelles le Reich a provoqué la Grande Guerre afin d’exercer son hégémonie sur l’Europe, voire sur le monde. Mais il s’inscrit aussi en faux contre les thèses de Christopher Clark pour qui les Européens se seraient laissé entraîner dans le conflit bien malgré eux. Alors que, selon Clark, les responsabilités dans l’éclatement de la Grande Guerre sont largement partagées, Krumeich démontre que l’Allemagne assume une responsabilité, certes non pas unique, mais néanmoins écrasante. Se sentant « encerclé » par une alliance hostile formée par Londres, Paris et Moscou – alliance qui était elle-même une réponse au comportement militariste allemand, Berlin aurait sciemment utilisé l’attentat de Sarajevo pour débarrasser l’Autriche-Hongrie de la menace serbe et, surtout, pour tester les intentions véritables de la Russie. La montée en puissance militaire de cette dernière avait suscité à Berlin des craintes si fortes que ce « test » semblait indispensable. D’après ce calcul, au mieux, la Russie devait se tenir à l’écart d’un conflit austro-serbe – ce qui eût permis en même temps d’affaiblir l’alliance franco-russe. Au pire, l’entrée en guerre de Moscou devait permettre aux Allemands, convaincus que le conflit avec la Russie était de toute façon inéluctable, d’en découdre avec cette dernière avant l’achèvement du programme d’armement russe que Berlin prenait très au sérieux. En revanche, les Allemands ont très fortement sous-estimé les capacités militaires de la France et sa force de résistance.

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