Laurent Marchand, éditorialiste pour Ouest France, consacre sa chronique « Tout un monde » à l’article écrit par Myriam Benraad dans le nouveau numéro de Politique étrangère, « Défaire Daech : une guerre tant financière que militaire ».
Comme une masse liquide injectée dans le grand Proche Orient, les territoires conquis par le groupe État islamique fluctuent sur les cartes du renseignement international. Ce que ces cartes ne montrent pas c’est l’assise économique et financière qui explique la fulgurante montée en puissance de Daech et sa force de frappe. L’organisation pèserait environ 2 milliards de dollars. Dans le numéro d’été de Politique étrangère, la revue de l’Institut international des relations internationales, Myriam Benraad, chercheuse au CERI-Sciences-Po, se penche sur « les rouages économiques et financiers » et la précarité socio-économique qui régnait en Irak qui ont permis à Daech, « dès son émergence sur la scène irakienne à l’automne 2006, de conquérir un vaste territoire ». Elle décrit la mise en place de réseaux de contrebande qui « préexistaient au renversement même de Saddam Hussein ». Elle énumère les différentes sources d’enrichissement de l’organisation : trafics d’armes, de biens, d’œuvre d’art, exploitation du gaz et du pétrole, « méthodes de levée et de transfert de fonds extrêmement sophistiquées », attaques contre des dizaines de banques, racket, rançons, commerce avec les agents d’Assad…
Depuis 2012 et la prise de contrôle par les rebelles de plusieurs postes-frontières, l’afflux de combattants étrangers n’a cessé d’augmenter en Syrie. À la fin 2014, près de 15 000 personnes ont ainsi rejoint les rangs de l’opposition à Bachar Al-Assad, dont environ 3 000 Occidentaux. Parmi ces derniers, les Français sont les plus nombreux. D’après les chiffres communiqués par le ministère de l’Intérieur en novembre 2014, plus de 1 000 ressortissants français étaient alors impliqués dans les filières syriennes.
Le livre d’Aurélie Daher, issu d’une thèse de doctorat en science politique, est le fruit de plusieurs années d’immersion durant lesquelles elle a mené des centaines d’entretiens auprès de hauts responsables, de militants et de sympathisants du Hezbollah. L’auteur entend apporter ici des réponses aux « interrogations quant à l’avenir du Hezbollah » à travers une étude « de la mobilisation du parti dans son pays d’origine ». Cette dernière repose, selon elle, sur trois catégories : militaire, politique et sociale. On la rejoindra aisément quand elle écrit que le parti a choisi « à partir de 2006 de refermer ses portes à l’observation […] rendant l’accès à son appréhension peu aisé ».
Ces deux ouvrages viennent à leur heure. Alors que se développent les interrogations sur la pertinence des choix des États-Unis et de l’Europe à l’égard du régime de Bachar Al-Assad, ils permettent de mieux comprendre les raisons pour lesquelles la politique menée en particulier par la France se trouve dans une impasse.
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