Étiquette : Union européenne Page 56 of 59

Vidéo de présentation de PE 4/2011

Dominique David, rédacteur en chef de la revue Politique étrangère, présente les deux dossiers du numéro 4/2011 :
« La déconstruction européenne ? »
« Démocratie, démocratisation »


La déconstruction européenne ? par Ifri-podcast

Pour vous abonner à la revue Politique étrangère, rendez-vous sur le site de La Documentation française.

L’Europe vue par…

Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (4/2011). Olivier Jehin, ancien responsable de l’Ifri à Bruxelles, propose une analyse conjointe des ouvrages d’Alain Minc, Un petit coin de paradis (Grasset, 2011), et de Laurent Cohen-Tanugi, Quand l’Europe s’éveillera (Grasset, 2011).

Îlot de paix et de prospérité cheminant à petits pas sur la voie de son intégration, l’Europe a été tout au long de la deuxième moitié du XXe siècle ce « petit coin de paradis » vanté par Alain Minc. Elle l’a été au point de souffrir de ce que l’on pourrait appeler le syndrome de l’île enchantée. Pendant les années grasses, elle s’est laissée aller à la torpeur de son bien-vivre sans penser à l’avenir, sans s’adapter au monde qui changeait, sans même prendre conscience d’elle-même.
Hier, tout allait si bien que rien ne pressait. À quoi bon accélérer l’intégration politique, l’union économique, la définition d’un « intérêt national européen », pour reprendre l’expression de Nicole Gnesotto, et d’objectifs stratégiques communs ? Aujourd’hui, alors que l’argent vient à manquer, tous les petits coins de ce paradis sombrent dans l’introversion, au risque de laisser l’édifice commun s’effondrer.
Comment ne pas voir qu’à force de cultiver leurs différences et leurs égoïsmes nationaux, les Européens, à l’image des Suisses, se condamnent, comme le dit A. Minc, à n’être plus que sujets d’une histoire qu’ils n’assument plus ? Pour échapper à l’engrenage et redevenir acteurs, il leur faut impérativement prendre conscience d’eux-mêmes, se penser comme Européens. À contre-courant de l’esprit du moment, ce petit livre résonne comme un vibrant appel à la fierté européenne, parce que « l’humilité interdit toute stratégie ; la fierté l’autorise ».
Et les raisons d’être fier d’être Européen sont légion. L’auteur décrit une Europe plus libérale et moins religieuse que les États-Unis et capable, dans le champ économique et social, si elle le veut vraiment, de « préserver un modèle d’équilibre sans égal au monde ». A. Minc croit en la capacité d’émulation entre États membres, qui apporterait « sans le vouloir et parfois sans le savoir » une saine contagion, allemande en matière budgétaire, française en politique industrielle, britannique dans l’innovation et scandinave dans la technologie. L’auteur préconise cependant de « préserver l’européanité de nos entreprises stratégiques », de fusionner les grands instituts de recherche et de constituer des universités européennes de rang mondial, d’élaborer une vraie politique européenne de « l’immigration choisie ». Et d’oser ce pari : « Avec des sociétés civiles de plus en plus actives, des groupes d’intérêt de plus en plus présents, des acteurs de plus en plus revendicatifs, la vision européenne de l’économie deviendra la référence. »

Pour Laurent Cohen-Tanugi, l’Europe doit se réveiller et se doter, dans les prochaines années, d’attributs lui permettant d’approcher le plus possible du statut de grande puissance, aussi intégrée et dynamique que possible. « Le temps presse, et l’heure n’est plus au réalisme de l’impuissance bridant depuis des années la volonté européenne, mais à l’audace libératrice », écrit l’auteur dans une critique à peine voilée de ceux qui nous gouvernent, à Bruxelles comme dans les capitales nationales.
Les faiblesses de l’Union européenne (UE) sont connues : budget communautaire sous-dimensionné et conçu comme un système de redistribution sans effet de levier ; union monétaire sans union économique ; déficiences dans les domaines clés de la démographie, de la productivité, de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ; dilution de l’esprit communautaire à la suite de l’élargissement ; absence de leadership, notamment de la Commission européenne ; échec de la logique intergouvernementale. À quoi il faut ajouter « une idéologie européenne » qui exclut le recours à la force, entraîne une réduction des dépenses militaires et définit l’UE comme une « puissance civile » à l’égard du reste du monde. Une idéologie, nous dit l’auteur, qui met l’Europe « en porte-à-faux face à l’évolution du monde, sorte d’exception naïve et menacée d’insignifiance dans un univers d’empires et de nations-continents ». Aussi l’Europe doit-elle enfin commencer à « ne plus se penser seulement comme modèle mais aussi comme puissance, à compléter son discours sur les valeurs et l’exemplarité par l’identification et la défense de ses intérêts, et à se doter d’instruments politiques, juridiques, diplomatiques et militaires comparables à ceux des autres pôles du Nouveau Monde ».
Cet essai veut « convaincre les États et les citoyens de la nécessité d’avancer vers une fédération d’États-nations afin que l’Europe demeure dans la course et pèse de tout son poids dans la mondialisation ». Pour y parvenir, l’auteur préconise la constitution de listes transnationales aux élections européennes et la nomination à la tête des institutions de personnes issues de la majorité parlementaire ; le remplacement des référendums nationaux pour la ratification des traités par une consultation à l’échelle de l’UE ; la généralisation de la codécision législative et du vote à la majorité qualifiée au Conseil ; une revalorisation et une autonomisation progressive du budget communautaire.
Cette décennie est décisive. L’Europe a des atouts mais elle doit d’urgence apprendre à en tirer profit pour promouvoir ses intérêts. Et L. Cohen-Tanugi de conclure : « À défaut de faire trembler la planète, le Vieux Continent a encore les moyens de demeurer l’un des pôles majeurs de prospérité et de civilisation du monde de demain. À condition que les Européens se réveillent enfin. »

Pour vous abonner à la revue Politique étrangère, rendez-vous sur le site de La Documentation française.


La déconstruction européenne? – Vidéos de la conférence

Le 2 février a eu lieu, à l’Ifri, une conférence de présentation du n°4/2011 de Politique étrangère. Cette conférence portait sur la crise de l’Europe politique. Maxime Lefebvre, directeur des relations internationales de l’ENA, et Alain Richard, ancien ministre de la Défense, y ont présenté leurs articles respectivement intitulés  » Réenchanter le rêve européen ?  » et  » Europe politique: un espoir est-il raisonnable ? « . Voici les vidéos de leurs interventions et un extrait du débat qui s’en est suivi.

Vidéo de l’intervention de Maxime Lefebvre :


Réenchanter le rêve européen ? (Maxime Lefebvre) par Ifri-podcast

 

Vidéo de l’intervention d’Alain Richard :


Europe politique : un espoir est-il raisonnable… par Ifri-podcast

 

Extrait du débat :


Défense et diplomatie en Europe : quelles… par Ifri-podcast

 

Nonfiction.fr : entretien avec Dominique David

À l’occasion de la sortie de Politique étrangère 4/2011, consacré en partie à la crise de l’Europe politique, Nonfiction.fr a posé quelques questions à Dominique David, rédacteur en chef de la revue.

Nonfiction.fr. Pourquoi l’expression « la déconstruction européenne ? » comme titre du dernier numéro de Politique étrangère ?

Dominique David. On est parti de la notion de construction européenne, de ses trois dimensions : unification économique, empilement institutionnel et espace « psycho-politique ». Or ce triptyque est en crise. Sur l’économie, l’Europe n’apporte plus la richesse. Elle n’est plus une garantie de prospérité et de croissance. L’Union européenne fait figure de puissance économique en décalage avec la mondialisation.
Au niveau institutionnel, le désordre est impressionnant. Les institutions de l’Union européenne ne correspondent pas à sa complexité. Et lorsque c’est éventuellement le cas, les peuples ne les comprennent pas. Le montage institutionnel post-élargissement n’est pas opérationnel et n’est pas reconnu comme légitime par les opinions. D’ailleurs, toute les décisions et avancées prétendant gérer l’actuelle crise se sont effectuées hors des institutions communautaires, celles-ci ne les récupérant que formellement.
Enfin, dans ce que je nomme « l’espace psycho-politique », la « crise de moral » est évidente. L’Europe n’est plus nécessaire à la paix pour les nouvelles générations et elle n’assure plus la prospérité économique. Quant à l’intergouvernementalisme exacerbé qui règle désormais le fonctionnement de l’UE, il engendre aussi une déconnexion avec les peuples européens. C’est d’ailleurs un paradoxe : l’intergouvernementalime actuel apparaît encore plus éloigné des peuples que pouvait l’être la méthode communautaire des années 1990.

Nonfiction.fr. Mais alors, quelles perspectives, quelles solutions ?

Dominique David. Il se dégage de notre numéro consacré à la crise européenne trois perspectives : les questions du projet, des institutions et de l’architecture générale. Sur le projet, il faut retrouver l’idée de croissance économique afin de travailler à la sauvegarde d’un style de société propre à l’Europe. Puis il faut régler le problème institutionnel et de la démocratisation de la construction européenne. Il y a d’ailleurs là débat. Un néo-chevènementiste considérerait que l’espace national est le seul espace de production de la démocratie, et que donc l’UE n’a rien à voir là-dedans. Une autre voie, celle de la création d’un espace politique européen, est défendue dans les contributions de Maxime Lefebvre et d’Alain Richard. Dans la situation actuelle, soulignent-ils, les nations ont la politique (politics) mais pas les politiques (policies), et inversement pour l’Union européenne.
Quant aux institutions, les économistes sont formels : il faut passer à un fédéralisme budgétaire – alors qu’aujourd’hui tout est intergouvernementalisme. On est donc en présence de deux tendances historiques contradictoires : la logique institutionnelle dominante, qui va vers l’intergouvernementalisme, et une sorte d’évidence technique ou fonctionnelle qui exige un saut vers le fédéralisme. Enfin, quant à l’architecture globale de l’UE, Maxime Lefebvre pose clairement la question – fondamentale – de savoir s’il est toujours raisonnable de voir l’Union européenne comme un ensemble homogène, organisé sur un mode pyramidal comme un espace politique unique.

Propos recueillis par Nicolas Leron et Estelle Poidevin, le 10 janvier 2012.

Pour s’abonner à la revue Politique étrangère, rendez-vous sur le site de la Documentation française.

Page 56 of 59

Fièrement propulsé par WordPress & Thème par Anders Norén