Mois : août 2012 Page 1 of 4

Politique du Web et Web politique : les médias sociaux font-ils la loi ?

INSCRIPTIONS CLOSES !

À l’occasion de la parution de Politique étrangère 2/2012, intitulé “Internet, outil de puissance”, le Social Media Club et l’Ifri vous proposent une conférence sur les enjeux politiques et économiques de la gouvernance d’Internet, le 18 septembre à la Cantine. Chercheurs et acteurs du Web français débattront sur les opportunités ou difficultés rencontrées sur les marchés étrangers.

Cette conférence se tiendra le 18 septembre à 19h à la Cantine (Paris 2e). Organisé en partenariat avec l’Ifri et soutenu par Silicon Sentier, l’événement est gratuit.
La conférence sera livetweetée sur le compte @IFRI_

S’INSCRIRE

Invités :

  • Séverine Arsène (@severinearsene), docteur en science politique de l’IEP de Paris, auteur d’Internet et politique en Chine (Karthala, 2011)
  • Gilles Babinet (@babgi), “Digital Champion” de la France auprès de la commissaire européenne chargée de la Société de l’information
  • Olivier Fecherolle (@OlivierFech), directeur stratégie et développement de Viadeo
  • Mounir Mahjoubi, directeur New Business Digital chez BETC
  • Natalie Rastoin, Directrice Générale d’Ogilvy France
  • Julien Nocetti (@JulienNocetti), chercheur associé à l’Ifri, coordinateur du dossier « Internet, outil de puissance » (Politique étrangère, été 2012)

Introduction et animation de la conférence par Alban Martin (@albanmartin), vice-président du Social Media Club France.

Informations : Aude Jeanson (01 40 61 60 25 / jeanson@ifri.org)

Batailles territoriales hier, luttes d’influence sur le Web aujourd’hui : le numérique a modifié les rapports de force internationaux mais aussi intérieurs. L’environnement numérique (canaux et standards techniques aussi bien que langage et culture) fait l’objet de négociations entre sociétés civiles, États et plus récemment acteurs privés. Google et Facebook les premiers reconfigurent les schémas classiques de la circulation de l’information : saupoudrés au fil des sites internet, les modules Facebook Connect américanisent par exemple les sets de données échangés sur les plates-formes du monde entier.

Pour Julien Nocetti, chercheur associé à l’Ifri, « savoir si [ces acteurs privés] pourront défier la souveraineté des États sans s’exposer à de puissantes ripostes sera l’une des questions clés des années à venir ». En effet, la censure chinoise constitue « un dilemme pour les entreprises étrangères. Elle les oblige à choisir entre le risque de voir leurs sites bloqués ou ralentis depuis la Chine et celui d’accéder au marché chinois en respectant la législation locale, donc en pratiquant un certain niveau de censure et de coopération avec les autorités », indique Séverine Arsène, docteur en science politique.

Dans ce contexte, le Web peut-il altérer les modes d’organisation sociale et politique des États ? Dans quelle mesure la Russie et la Chine se servent-ils d’Internet pour contrôler leur population et renforcer leur place sur la scène internationale ? Pourquoi seuls les internautes russes et chinois font-ils exception à l’adoption massive de Facebook ? Renren et Vkontakte résisteront-ils encore longtemps aux investisseurs étrangers ?

Lorsqu’un État soutient les fleurons de son industrie digitale, doit-on y voir une volonté de s’étendre à l’international ou une stratégie de nationalisation de son espace numérique ?

Quelle est la marge de manœuvre des acteurs du Web social, dont les services et les modèles économiques reposent sur l’adoption massive par les populations, populations que les états, autoritaires comme démocratiques, tendent à vouloir contrôler ?

Finalement, quelle grille de lecture peut-on proposer pour saisir les stratégies des acteurs dans cette lutte pour la gouvernance du Web, aussi bien à l’échelle nationale que mondiale ?

Les cultures régionales des Etats-Unis

Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (2/2012). Laurence Nardon, responsable du programme Etats-Unis de l’Ifri, propose une analyse de l’ouvrage de Colin Woodard, American Nations: A History of the Eleven Rival Regional Cultures of North America (New York, Viking Press, 2011, 384 pages).

Colin Woodard propose une histoire des États-Unis vue sous l’angle de ses cultures régionales. Il postule que les différentes aires culturelles d’Amérique du Nord (Mexique et Canada inclus) ont été établies par les premiers pionniers sur la base de leur religion, de leur gouvernement et de leur économie. Aux siècles suivants, les immigrants qui se sont installés dans ces régions, loin d’imposer leur propre culture, se sont adaptés à celle des premiers arrivés. Les frontières de ces zones culturelles ont pu bouger mais leurs identités sont restées les mêmes. Parmi les 11 régions identifiées, voici les plus intéressantes.
La région yankee : les premiers colons arrivés dans le Nord des États-Unis étaient des puritains d’une grande intolérance religieuse, organisés en communautés politiques fortes pour assurer le bien de tous. Les démocrates qui dominent la région aujourd’hui sont toujours perçus comme donneurs de leçons et favorables au rôle de l’État.
Les quakers de Pennsylvanie montraient en revanche un grand respect pour les autres ethnies et religions, ainsi qu’un fort antimilitarisme. Ils constituent aujourd’hui les États modérés des Midlands, qui décident souvent de l’élection présidentielle.
New York, l’ancienne New Amsterdam, a été peuplée de commerçants hollandais, ouverts à un multiculturalisme total pour peu que le commerce soit respecté : une assez bonne définition de la Grosse Pomme aujourd’hui.
Le Sud fut peuplé d’aristocrates anglais venus non de la nation mère mais de la Barbade, où ils avaient développé des plantations fondées sur un cruel esclavagisme. Ils importèrent leur système dans le Sud des États-Unis, avec les conséquences qu’on sait.
Le respect des Amérindiens et la créolisation aujourd’hui observés au Québec et à La Nouvelle-Orléans renvoient sans doute aux relations égalitaires mises en place par les premiers colons français dans ces régions.
Les Appalaches, peuplées d’immigrés écossais et irlandais héritiers de siècles d’histoire violente, sont encore aujourd’hui les plus favorables aux interventions armées extérieures.
Les plaines de l’Ouest des États- Unis étaient trop arides pour le développement agricole : individualistes, parfois extrémistes, les descendants des premiers colons affichent encore aujourd’hui leur rancœur contre un État fédéral dont ils n’ont jamais pu se passer.
La côte ouest, de la Colombie britannique au nord de la Californie, fut peuplée des mêmes pionniers individualistes, ici accompagnés d’un certain nombre de Yankees : sa culture se caractérise par un individualisme idéaliste et innovateur, mâtiné d’une grande confiance dans l’État pour améliorer la situation sociale.
Si C. Woodard reprend les thèses d’autres chercheurs (David Hackett Fischer, Albion’s Seed, ou Joel Garreau, The Nine Nations of North America), il les étend à tout le continent et à toute l’histoire moderne. Il étaie sa démonstration par une analyse poussée des élections locales, des recensements et des sondages des dernières décennies.
Il propose au final une thèse captivante, qui revisite les événements de l’histoire américaine sous un angle nouveau (par exemple la guerre du whisky des années 1790). On peut cependant regretter l’absence de réflexion sur la culture des Noirs américains en tant que groupe : peut-être l’objet d’un prochain ouvrage ?

Laurence Nardon

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La montée sanglante des cartels mexicains

Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (2/2012). Emmanuelle Le Texier propose une analyse de l’ouvrage de Ioan Grillo, El Narco : la montée sanglante des cartels mexicains (Paris, Buchet-Chastel, 2012, 358 pages).

Ioan Grillo, grand reporter, britannique de naissance, vit à Mexico City et couvre la « guerre contre la drogue » au Mexique depuis une dizaine d’années. Il tente ici de brosser une histoire à la fois « globale » et « partielle » de l’organisation de l’« industrie de la drogue ». La narration est vivante, la forme parfois proche de celle d’un roman policier ou d’une autobiographie mettant en exergue le rapport du journaliste à son objet. On ne peut pas ne pas penser à la récente publication de sa consœur du journal Le Monde Babette Stern, qui, dans Narco Business : l’irrésistible ascension des mafias mexicaines (Paris, Max Milo, 2011), se livre, dans un style moins littéraire, au même exercice : narration d’une histoire « vivante », parfois sensationnaliste, toujours émaillée de récits biographiques, anecdotes de terrain, notes de presse, souvenirs anciens ou récents d’une part ; analyse fondée sur le recul lié à l’expérience et aux sources universitaires d’autre part.
La thématique est certes courue et le travail de l’enquêteur se mêle à celui du peintre d’une réalité sociale et politique sordide, dramatique et violente. À force de portraits d’anciens trafiquants, de leur famille, de leurs voisins, des prisonniers et ce des deux côtés de la frontière, l’auteur parvient à ses fins : décrire un système qui donne naissance aux organisations mafieuses et aux réseaux criminels qui recomposent les territoires au Mexique (et aux États-Unis). Il « raconte l’histoire de la transformation radicale de ces trafiquants de drogue en escadrons de la mort paramilitaires […] et la brutalité de leur capitalisme mafieux ». On n’y cherchera pas de réflexion sur le caractère transnational des réseaux ou sur les recompositions géopolitiques ; ni les digressions conceptuelles émaillant habituellement les travaux sur le crime organisé. On y trouvera en revanche une multitude de termes désignant l’ascension des cartels mexicains : des réseaux, une industrie, une insurrection, une guerre civile, un cas d’école, un capitalisme mafieux, un « narco-État », un « État captif », un « État failli », un mouvement, un crime organisé, etc. Bref, jamais l’auteur ne choisit une définition stricte.
Une affirmation est pourtant centrale : « La guerre de la drogue au Mexique est inextricablement liée à la transition démocratique. » Ainsi, par la diversité même des notions employées, on voit que les facteurs qui assurent la montée des cartels sont multiples. C’est la description même du phénomène, son « anatomie », comme l’appelle l’auteur en deuxième partie de l’ouvrage, qui en fait la richesse. Si la partie historique reste assez fragile (les relations États-Unis/ Mexique servent seulement de toile de fond), comme celle sur les orientations futures du narcotrafic, la description de la spirale infernale de la violence depuis la fin des années 1980 et celle des différents piliers du mouvement « narco-insurgé » atteignent leur but. Même si le livre emprunte parfois des accents propres à un certain romantisme, l’enquêteur se trouvant passionnément débordé par son objet, l’ironie et parfois l’autodérision permettent aussi de mieux se distancier du bain de sang et des exactions relatées au fil des pages. Le lien qui apparaît comme essentiel est bien la relation inextricable entre corruption, drogue, politique et société globalisée.

Emmanuelle Le Texier

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Contemporary Indian Foreign Policy

Cette recension d’ouvrage est issue de Politique étrangère (2/2012). Isabelle Saint-Mézard, chercheur associé au Centre Asie de l’Ifri et maître de conférences en géopolitique asiatique à l’Institut français de géopolitique de l’université Paris 8, propose une analyse de l’ouvrage de David M. Malone, Does the Elephant Dance? Contemporary Indian Foreign Policy (Oxford University Press, 2011, 448 p.).

Universitaire et diplomate, David M. Malone dresse dans cet ouvrage un panorama des enjeux de la politique étrangère de l’Inde et s’appuie pour ce faire sur son expérience de Haut Commissaire du Canada à New Delhi de 2006 à 2008. Son analyse se concentre sur les principaux axes de la diplomatie indienne : le partenariat avec les États-Unis et trois dossiers majeurs – le voisinage immédiat, la Chine et les grandes négociations multilatérales.
Si les relations de l’Inde avec l’Asie orientale, le Moyen- Orient, la Russie et l’Europe sont aussi évoquées, on regrettera que celles avec l’Afrique et l’Asie centrale manquent au tableau. Par ailleurs, le choix de traiter la Russie et l’Union européenne (UE) en un même chapitre, au motif que leurs relations avec l’Inde sont sur le déclin, s’avère discutable. Concernant l’Asie du Sud, l’auteur rappelle judicieusement que l’incapacité de l’Inde à pacifier ses relations avec ses voisins constitue la principale faiblesse de sa politique extérieure. En l’occurrence, New Delhi n’a pas d’autre choix que de « convaincre ses voisins que l’Inde est une opportunité, pas une menace ». Si les difficultés de l’Inde en Asie du Sud sont finement analysées, la relation conflictuelle avec le Pakistan mériterait, elle, d’être traitée plus en profondeur. L’affirmation, présentée dès l’introduction, selon laquelle « une guerre incontrôlée et de grande ampleur entre les deux pays est aujourd’hui moins probable que jamais » demanderait à être étayée, tant l’hostilité entre les deux États garde un caractère structurel.
Le meilleur de l’ouvrage se trouve dans le chapitre sur la diplomatie multilatérale indienne. En la matière, l’auteur constate une « prédilection grandissante de l’Inde pour la gouvernance mondiale par oligarchie », c’est-à-dire en coalition avec d’autres grands « émergents », comme cela a été le cas par exemple avec le groupe BASIC (Brésil, Afrique du Sud, Inde et Chine) lors des négociations de la conférence de Copenhague sur le changement climatique en 2009. Autrement dit, l’Inde évite le « vrai multilatéralisme » et investit plutôt dans une diplomatie de club pour « comanager le système international au plan économique et, dans une moindre mesure, en matière de sécurité ». De surcroît, tout en se ralliant à cette diplomatie d’élites, l’Inde ne se montre en rien disposée à endosser des responsabilités internationales. D.M. Malone met ainsi en lumière le décalage entre les ambitions de la diplomatie indienne et la réalité de sa pratique, avant de conclure : « Alors que l’Inde a gagné en stature internationale, la transition de sa politique extérieure reste incomplète mais sa contribution est de plus en plus attendue. Il en est ainsi des manières à la table des grands. »
L’ouvrage, qui fourmille de détails et d’informations, repose sur un vaste corpus de sources secondaires dont la bibliographie rend largement compte au gré de ses 30 pages. Le propos, toujours clair, lui donne par ailleurs une qualité très didactique. Does the Elephant Dance? constitue donc une solide introduction générale pour ceux qui ne sont pas familiers des problématiques extérieures indiennes, tout en fournissant aux spécialistes une mine d’informations à laquelle se référer.

Isabelle Saint-Mézard

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