Cette recension est issue de Politique étrangère 2/2013. Théo Corbucci propose une analyse de l’ouvrage de Georges Corm, Pour une lecture profane des conflits. Sur le « retour du religieux » dans les conflits contemporains du Moyen-Orient (Paris, La Découverte, 2012, 278 pages).
Georges Corm propose ici une compilation de conférences et articles précédemment publiés, un plaidoyer pour une « lecture profane des conflits ». Selon lui, les affrontements qui se déroulent actuellement au Proche et Moyen-Orient sont principalement le fruit d’une vision « religio-centrée » de la part des dirigeants qui, en paroles et en actes, opposent un Occident chrétien à un Orient musulman, dans une dynamique de confrontation qui ne peut que s’accentuer au fil des ans au risque de se conclure en conflits, en particulier armés. Le sujet n’est pas novateur et G. Corm lui-même a pris soin de déconstruire bon nombre de ces filtres ou préjugés (« Orient-Occident, la fracture imaginaire » ; « L’Europe et le mythe de l’Occident »).
L’auteur n’apporte guère de plus-value à l’analyse. Il propose, dès le premier chapitre, un retour aux « techniques d’une politologie profane et multifactorielle des conflits ». Le regard d’un Samuel Huntington l’aurait donc définitivement emporté et se serait généralisé. Pourtant, s’il est vrai que ces discours simplificateurs existent encore aujourd’hui, dans une partie de la vulgarisation journalistique ou de la communication de certains politiques, il est néanmoins contestable d’avancer qu’ils continuent à être la norme, en particulier dans le monde de la recherche.
Le constat posé, G. Corm s’engage dans la critique, au plan international, des diverses mises en scènes identitaires et des recours au religieux, tantôt catalyseurs, tantôt déclencheurs de troubles internationaux, avec toujours comme objet d’analyse le Proche et le Moyen-Orient. Sans oublier, de manière plus générale, la critique de la manipulation du droit international et des Droits de l’homme. L’auteur en appelle, au final, à un sursaut républicain mondial, ainsi qu’à la diffusion d’une « laïcité laïcisée », c’est-à-dire dépassant son contexte historique spécifique. Mais il n’en dit pas plus. En somme, Pour une lecture profane des conflits peut laisser un sentiment d’inachevé. Les deux premières parties (« Déconstruire la logique de justification des conflits » et « La manipulation de la mémoire et de l’histoire, causes des conflits ») n’apportent que peu à ce qui a été déjà publié sur le sujet, tandis que la dernière (« Problématique de la laïcité et de la liberté »), la plus stimulante, mériterait une analyse beaucoup plus exhaustive et structurée.
Théo Corbucci
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