Le 3 septembre dernier, Brice Pedroletti a publié dans Le Monde un article consacré aux  ambitions croissantes de la Chine et au risque qu’elles représentent pour les pays d’Asie de l’Est. Il cite à cette occasion le dossier du numéro d’été de Politique étrangère (n° 2/2021), « L’Asie de l’Est face à la Chine ».

La montée en puissance de la Chine, son affirmation et l’ambition qu’elle projette dans le monde ont un impact immédiat, fracassant et irréversible sur les pays de la région qui l’entourent, et en particulier ces tigres et dragons de l’Asie de l’Est, enrichis par les décennies de délocalisation occidentale et pour la plupart protégés par le parapluie sécuritaire américain.

C’est l’immense mérite du numéro d’été de la revue trimestrielle de l’Institut français des relations internationales (Ifri), Politique étrangère, de s’intéresser de près à la manière dont le Japon, la Corée du Sud, Taïwan, les pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), et enfin l’Australie ont subi, mais aussi négocié l’émergence du géant chinois, parce que, comme l’écrit Marc Julienne, responsable des activités Chine au centre Asie de l’Ifri, ils « concentrent à la fois le plus de tensions, politiques militaires, stratégiques et le plus d’intérêts, commerciaux, financiers, technologiques », tout en se retrouvant « pris entre les deux fronts de la rivalité sino-américaine ». Venue de Chine, la crise du Covid est un révélateur de tous ces tiraillements et a exacerbé une défiance croissante vis-à-vis de Pékin.

« Cooptation, corruption, coercition »

Le cas de l’Australie, radiographié par Nadège Rolland, est révélateur entre tous de la stratégie déployée par la Chine vis-à-vis des pays de culture occidentale en dehors des Etats-Unis : un mélange vénéneux de « cooptation, corruption et coercition », dont Canberra ingère une pleine dose, avant de l’identifier et de développer contre lui des anticorps. Les pays d’Asie du Sud-Est, comme l’analyse Sophie Boisseau du Rocher, sont eux considérés par la Chine comme son « premier terrain d’expérimentation ».

Tiraillés par leurs propres contradictions et la faiblesse structurelle de leurs démocraties imparfaites ou fortement contrariées, ces pays sont bien moins résistants au mastodonte chinois, mais la plupart n’en développement pas moins des stratégies propres de coexistence et de contrepoids.

L’Asie du Nord-Est est, elle, un champ de bataille à couteaux tirés, ou presque : le Japon, la Corée du Sud et Taïwan sont à la fois trop puissants, trop proches des Etats-Unis, et trop liés économiquement à la Chine pour que celle-ci ne puisse sans conséquence majeure changer les équilibres en sa faveur – du moins tant que la superpuissance américaine veille. […]

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