Dans sa chronique du 18 octobre 2023 pour Le Nouvel Économiste, Jean-Michel Lamy s’interroge sur les différentes déstabilisations régionales en cours et les risques qui pèsent sur les démocraties occidentales, notamment sur le modèle économique européen. Il cite à ce titre le dossier du dernier numéro de Politique étrangère (n° 3/2023), « Union européenne : l’illusion géopolitique ? », publié en septembre 2023.

Occident global contre Sud global. Cette formulation, signée Poutine, est globalement fausse. Mais à bas bruit, elle pourrait devenir autoréalisatrice. Les guerres de l’Ukraine et d’Israël contre les envahisseurs se jouent à la fois sur le terrain idéologique et militaire. En défendant leur territoire, les deux capitales défendent les valeurs de l’universalisme démocratique. En combattant un rêve impérial d’annexion dans un cas et un rêve d’anéantissement dans l’autre, les deux capitales luttent pour leur identité.

Ces conflits pèsent déjà sur le destin du modèle économique européen. Les dirigeants des Vingt-Sept devront “vendre” à leurs opinions plus d’investissement dans les secteurs de la défense et de la sécurité, et expliquer où sera pris l’argent. Cette économie de guerre va progressivement entrer en concurrence avec les demandes de capitaux pour la transition climatique. Au bout du compte, la consommation servira de variable d’ajustement !

Les guerres se rapprochent

Pour Israël, l’irruption des terroristes islamistes du Hamas à l’intérieur de son habitat renvoie à la mémoire des pogroms. Cette dimension n’est réductible à aucune autre. Les chocs en retour de la riposte militaire d’Israël sur la bande de Gaza toucheront le Proche et le Moyen-Orient. Au-delà de cette géographie, les alliés traditionnels d’Israël auront à prendre leurs responsabilités sans faiblir. Notamment en dissuadant l’Iran de pousser les feux du Hezbollah libanais. L’avenir dira si la diplomatie américaine, voire européenne, arrive à garder la parole en donnant espoir aux Palestiniens autour de la solution “deux peuples, deux États”. […]

Dans cet univers cabossé, l’Union européenne (UE), fière de son grand marché et de ses régulations, voit monter à la surface des vulnérabilités jusqu’alors mises sous le boisseau. “L’invasion Poutine” du 24 février 2022 contre Kiev a mis en lumière les défaillances des adhérents à la zone euro. Elles sont militaires. Quatorze membres sur vingt cotisent pour moins de 2 % du PIB à ce type de dépenses et ne disposent pas de stocks d’armes suffisants. Elles sont énergétiques. La course aux contrats gaziers à n’importe quel prix en a fait la démonstration. Elles sont industrielles. “Les États les mieux intégrés dans la mondialisation – Allemagne, Autriche, Slovaquie – voient leur modèle productif ébranlé”, pointe la revue ‘Politique étrangère’ de l’Institut français des relations internationales (Ifri). […]

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