À la suite du sondage réalisé sur ce blog, nous avons le plaisir de vous offrir en libre accès et en avant-première l’article du numéro d’automne 2024 de Politique étrangère (n° 3/2024) que vous avez choisi d'(é)lire : « Caucase du Sud, un nouvel échiquier stratégique ? », écrit par Gaïdz Minassian, journaliste au Monde et enseignant à Sciences Po.
Difficile d’y voir clair dans ce Caucase du Sud (Arménie, Azerbaïdjan et
Géorgie) en pleine mutation, à l’instar d’un monde entré en transition
sous l’effet d’une plus forte rivalité, entre les puissances qui veulent
conserver l’ordre mondial tel qu’il est et celles qui contestent une domination occidentale supposée. Coincé entre la guerre classique qui oppose la Russie à l’Ukraine en Europe orientale et la guerre asymétrique entre Israël, le Hamas et ses parrains (Hezbollah, Syrie, Iran) à Gaza, le Caucase du Sud essaie de trouver une place stable sur une scène internationale de plus en plus morcelée.
De prime abord, rien n’a changé dans cet isthme sud-caucasien : la
conflictualité reste de mise entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, la démocratie
est contestée à Tbilissi et à Erevan, l’Azerbaïdjan du dictateur Aliev est la
seule puissance régionale, le tout étant encerclé par d’anciens empires au
fort appétit. Pourtant, le Caucase du Sud n’échappe pas à la recomposition
géopolitique mondiale où les puissances des hémisphères est et sud
se heurtent à une poussée sans précédent de l’Occident – ce qui complique
la lecture de développements régionaux déjà difficiles d’accès.
Pour autant, peut-on parler d’un nouvel échiquier stratégique dans le
Caucase du Sud, où s’interpénètrent des forces classiques et nouvelles aux
intérêts parfois complémentaires, souvent contradictoires, où se cristallise
aussi un choc entre des processus fluides réversibles et des lourdeurs
structurelles parfois obsolètes ?
Dans cette confusion géopolitique, militaire, politique, économique,
sociale et culturelle, deux vecteurs se dégagent qui aident au décryptage,
porteurs d’un double enjeu régional. D’une part, la dialectique démocratie/
autocratie dans laquelle la Russie joue un rôle déterminant : si la
démocratie l’emporte dans les trois républiques, l’autocratie recule et,
avec elle, l’influence russe. En revanche, si la démocratie perd du terrain
dans la région, la Russie conforte sa rhétorique néo-impériale de l’« étranger
proche », comme si le monde tournait encore autour des zones
d’influence. D’autre part, les perspectives d’ouverture régionale sont
l’objet de deux approches discordantes : d’un côté celle qui défend l’idée
d’un Caucase du Sud ouvert à tous, de l’autre celle qui favorise le désenclavement eurasien de la région. De cette double confrontation, parfois
invisible mais incessante, parfois inintelligible mais incandescente, sortira
un Caucase du Sud au visage toujours marqué par la conflictualité, de
basse ou haute intensité, mais mieux intégré, ou non, aux dynamiques
globales et aux enjeux mondiaux.
Démocratie ou autocratie ?
S’il ne fait pas l’unanimité dans la communauté des chercheurs et experts,
le clivage démocratie/autocratie propose, pour le Caucase du Sud, une
grille de lecture cohérente de la fragmentation du système international.
Dans ce couloir stratégique plus qu’ailleurs peut-être, les logiques démocratiques sont depuis longtemps en rivalité avec les logiques autocratiques, avec respectivement d’un côté l’Arménie et dans une moindre
mesure la Géorgie, et de l’autre l’Azerbaïdjan. À cette première grille
d’interprétation, une seconde plaque, militaire cette fois, s’ajoute pour les
trois États sud-caucasiens, perméables à l’évolution de la guerre en
Ukraine et à celle du conflit larvé entre Israël et l’Iran. […]
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Lisez en intégralité l’article de Gaïdz Minassian ici.
Découvrez le sommaire du prochain numéro de Politique étrangère
(n° 3/2024) ici.
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