Cette recension a été publiée dans le numéro d’hiver de Politique étrangère
(n° 4/2018)
. Rémy Hémez, ancien collaborateur du Centre des études de sécurité de l’Ifri, propose une analyse de l’ouvrage dirigé par Philippe Chapleau et Jean-Marc Marill, Dictionnaire des opérations extérieures de l’armée française. De 1963 à nos jours (Nouveau Monde Éditions, 2018, 456 pages).

Les opérations extérieures (OPEX) structurent les armées françaises depuis la fin de la guerre d’Algérie. Une « nouvelle génération du feu » – plus de 250 000 militaires – a servi à l’extérieur de nos frontières au prix de 700 morts et plus de 6 000 blessés. Ces dernières années, les écrits de militaires se sont multipliés, mais ils sont le plus souvent des témoignages, et les analyses historiques les complétant sont encore rares.

Pendant longtemps, les seules références exhaustives sur le sujet ont été des travaux officiels, en particulier ceux du Centre de doctrine de l’armée de Terre, avec, par exemple, le « Répertoire typologique des opérations ». Le présent dictionnaire dirigé par Philippe Chapleau, journaliste spécialisé dans les questions de défense, et Jean-Marc Marill, ancien directeur du Centre historique des archives de la défense, vient donc combler un vide en cherchant à dresser un bilan – non exhaustif – des opérations extérieures menées par les armées françaises depuis 1963 (les auteurs en recensent 119).

Le livre est organisé en deux grandes parties. La première est consacrée aux opérations qui sont chacune présentées dans une notice de longueur variable. On y retrouve bien entendu les OPEX les plus emblématiques comme « Limousin » au Tchad de 1969 à 1972 et
« Épervier » dans ce même pays de 1986 à 2014, la participation à la Force de protection des Nations unies (FORPRONU) en Bosnie et en Croatie de 1992 à 1995, « Trident » au Kosovo de 1998 à 2014, « Licorne » en Côte d’Ivoire de 2002 à 2012, « Pamir » en Afghanistan de 2001 à 2014, « Serval » au Mali de 2013 à 2014 ; mais aussi les OPEX qui se déroulent encore aujourd’hui telles que « Barkhane » (Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad, Mauritanie) ou « Chammal » (Irak).

Ces opérations recouvrent des réalités extrêmement diverses : missions d’intervention ou d’interposition, évacuation de ressortissants, acheminement d’aide humanitaire, contre-insurrection, lutte contre le terrorisme ou la piraterie, accompagnement ou entraînement d’armées locales, menées dans le cadre d’une force de l’Organisation des Nations unies (ONU), en multilatéral ou unilatéralement, etc.

La deuxième partie du dictionnaire – « Moyens et environnement » – se compose de notices thématiques. On y retrouve d’abord une approche capacitaire (appui aérien, ciblage, opération amphibie, etc.), puis des articles sur le cadre national et international (mandat, diplomatie navale), où l’on découvre notamment que 25 % des OPEX ont été menées au titre des accords de défense ou d’assistance, et 31 % sous le commandement de l’ONU. Cette seconde partie aborde aussi les questions de l’environnement des opérations (actions psychologiques, action humanitaire, communication, etc.), de l’organisation des forces (bases pré-positionnées, réserves, prévôté, etc.) et du soutien (surcoût des OPEX, logistique, etc.). En fin d’ouvrage, on retrouve une utile chronologie.

Ce dictionnaire réunit quelques-uns des meilleurs spécialistes des armées françaises et trouve un bel équilibre entre contributeurs militaires et civils. Il constitue un très bon outil de travail pour tous ceux qui s’intéressent à l’histoire militaire française contemporaine.

Rémy Hémez

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