Cette recension a été publiée dans le numéro d’hiver 2020-2021 de Politique étrangère (n° 4/2020). Aurore Colin propose une analyse croisée des ouvrages de Christian de Perthuis, Le tic-tac de l’horloge climatique. Une course contre la montre pour le climat (De Boeck Supérieur, 2019, 336 pages) et de Marie-Antoine Mélières et Chloé Maréchal, Climats : passé, présent, futur (Belin, 2020, 432 pages).
Ces deux ouvrages ont pour point commun d’apporter un éclairage rigoureux, dense et documenté sur le lien entre changement climatique et activités humaines. Bien qu’ils se rejoignent sur la nécessité d’accélérer la lutte contre le changement climatique, leurs démarches sont différentes. L’économiste Christian de Perthuis nous livre une analyse économique, sociale, historique et géopolitique de la question climatique. Marie-Antoinette Mélières et Chloé Maréchal, respectivement docteurs en physique et géochimie, nous proposent les bases scientifiques nécessaires pour comprendre le fonctionnement du climat et appréhender son changement en cours.
Les premiers chapitres de leur ouvrage décrivent le fonctionnement du climat à l’aide de nombreux schémas, équations et variables représentant des phénomènes souvent très complexes. Le cœur de l’ouvrage se situe dans les chapitres suivants. Plus accessibles, ils démontrent de manière scientifique que le climat moyen se réchauffe depuis les années 1970-1980, et que ce réchauffement est causé exclusivement par l’activité humaine. Cette évolution récente du climat est analysée à la lumière de ses évolutions passées. La conclusion est glaçante : le bouleversement actuel du climat « n’a pas son équivalent sur les dernières centaines de milliers d’années et selon toute vraisemblance sur les trois derniers millions d’années ». Les auteurs nous alertent ainsi sur les conséquences actuelles et futures du changement climatique, abordées en fin d’ouvrage. Face au constat scientifique alarmant, quelles mutations nos sociétés doivent-elles accomplir pour réduire leur impact sur le climat ? Comment opérer ces mutations ? Et à quel rythme ? C’est à ces questions que Christian de Perthuis propose de répondre.
Si Marie-Antoinette Mélières et Chloé Maréchal mettent en lumière le caractère inédit du bouleversement actuel du climat, Christian de Perthuis insiste quant à lui sur le caractère inédit, par leur rapidité et leur rupture avec les tendances passées, des mutations à opérer dans nos modèles énergétiques et économiques pour éviter la catastrophe climatique. S’appuyant sur des analyses historiques, des constats documentés et des exemples efficaces, l’auteur décrit les deux principaux défis auxquels doivent répondre nos sociétés : réduire drastiquement leurs émissions de gaz à effet de serre pour atteindre la neutralité carbone dès 2070, et s’adapter aux impacts climatiques qui vont s’accentuer dans les prochaines décennies. L’atteinte de la neutralité carbone repose sur deux jambes : une transition vers un système énergétique majoritairement renouvelable nécessitant une sortie rapide des fossiles, et une transition agro-écologique impliquant une réorganisation des ressources forestières et agricoles.
La dernière partie de l’ouvrage contraste avec la neutralité scientifique et idéologique de l’ouvrage Climats : passé, présent et futur, mais n’en est pas moins pertinente. Dans cette partie intitulée « Justice climatique », Christian de Perthuis identifie les leviers, notamment économiques, qui permettraient d’accélérer la transition bas-carbone en France et dans le monde. Tirant les leçons des Gilets jaunes, il définit les principes de justice que ces leviers doivent prendre en compte pour susciter l’adhésion du plus grand nombre, et identifie cette adhésion comme étant un prérequis incontournable à la réussite d’une transition juste et bas-carbone.
Aurore Colin
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