Cette recension a été publiée dans le numéro d’été 2023 de Politique étrangère (n° 2/2023). Diane Mordacq propose une analyse de l’ouvrage de Glenn Denning, Universal Food Security: How to End Hunger While Protecting the Planet (Columbia University Press, 2023, 448 pages).

Photographie d'arrière-plan de Ricardo Gomez Angel  (Unsplash) représentant des champs de cultures diverses. Au premier plan, couverture du livre de Glenn Pending.

Glenn Denning s’intéresse ici à la transformation du système alimentaire dans le but de parvenir à une alimentation nutritive pour tous, tout en préservant l’environnement. Praticien, universitaire, enseignant et conseiller agricole de renommée mondiale, l’auteur a souhaité compiler les connaissances multiples qui existent sur le sujet. L’ouvrage propose un format dynamique où se succèdent des récits d’expériences vécues par l’auteur, des réflexions de ses pairs, des schémas synthétiques et des photographies.

Pendant des millénaires, le climat a façonné la répartition géographique et la productivité de l’agriculture. Aujourd’hui changeant, il s’accompagne d’une dégradation des ressources naturelles nécessaires à la production, à savoir l’eau et le sol. Sans tomber dans l’optimisme technologique, Glenn Denning présente sans tabou les technologies au service de la production et considère leur utilisation complémentaire au savoir et à l’intelligence humaine. Le défi alimentaire à venir est immense, puisqu’en plus du milliard de terriens aujourd’hui en situation de « sous-nutrition » et des deux milliards qui sont en situation de « surnutrition », la population mondiale devrait croître de 25 % d’ici 2050.

Pour Glenn Denning, l’effort à fournir afin d’atteindre une alimentation nutritive pour chacun tout en préservant l’environnement ne repose pas seulement sur la production agricole mais sur l’ensemble du système alimentaire – collecte, transformation, distribution, consommation et gestion des déchets. En proposant de le doter de sept attributs – productif, rentable, inclusif, sain, durable, résilient et éthique –, l’ouvrage s’inscrit dans le concept de durabilité forte. C’est-à-dire qu’il considère l’importance des trois piliers de la durabilité – l’environnement, le social et l’économique – de manière égale, et estime qu’ils sont non compensatoires. Par exemple, l’augmentation du capital environnemental ne peut pas compenser une baisse du capital social ou économique, et vice-versa.

L’auteur identifie au sein du secteur privé, du secteur public, de la société civile, du monde académique et de la population des « agents de la transformation » capables de mener les investissements nécessaires au changement du système alimentaire. Leur point commun ? Une capacité d’analyse interdisciplinaire, intersectorielle et pratique. Ces 448 pages de connaissances s’imposent d’ailleurs comme un guide de qualité pour tous ceux qui souhaiteraient devenir à leur tour acteurs du changement. Au-delà des riches enseignements apportés sur le sujet traité, l’ouvrage est un véritable appel au « faire ensemble » et au « penser global ». Il reste maintenant à appliquer tout ce savoir aux réalités de terrain.

Pour pousser encore plus loin le raisonnement systémique caractéristique du sujet traité, la démarche pourrait porter un regard sur d’autres utilisations de l’agriculture, comme la production d’énergie ou de matériaux. Ces usages, bien que non vitaux, sont essentiels, et il faudrait sans doute réussir à les concilier, plutôt que de les opposer.

Diane Mordacq

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